[Mécénat et philanthropie] dans l'Art
Interview de Virginie Burnet présidente et fondatrice de l’art en plus, une agence de conseil en communication et en production de contenus culturels.
By Pascale Caron
Virginie Burnet a fondé l’art en plus en 2009 pour allier son engagement de longue date pour le mécénat et la philanthropie avec sa passion pour l’art et la culture.
Dans son agence de conseil en communication et en production de contenus culturels, elle accompagne les acteurs privés, mécènes et philanthropes, engagés dans la société et la création. L’agence développe leur visibilité, leur influence, conçois et pilote des projets artistiques, mobilise des talents et des ressources créatives.
Comment es-tu devenue entrepreneure et d’où vient l’idée de l’art en plus ?
J’ai fait des études de Droit, d’Histoire de l’art et ensuite Sciences Po Paris. À 23 ans j’ai rejoint l’hôtel Drouot, carrefour alors incontournable du marché de l’art. J’y ai dirigé pendant 17 ans le département communication et relations médias. J’étais responsable à la fois de la communication institutionnelle des commissaires-priseurs parisiens et des campagnes de presse internationale des grandes ventes aux enchères. J’ai initié les premières expositions curatées par des personnalités du monde de l’art — de la Chinoise Pearl Lam au français Guillaume Houzé — et j’ai organisé de nombreux événements de relations publiques et caritatives.
Ce monde des ventes aux enchères et des collectionneurs me procurait beaucoup d’adrénaline, mais après toutes ses années, j’ai eu envie d’autre chose. L’univers du mécénat et de la philanthropie privée m’enthousiasmait. En 2008, soutenue par mon mari et avec 2 enfants en bas âge, je décide de quitter le marché de l’art et je fonde ma société en 2009. Je ne viens pas d’une famille d’entrepreneurs. Un des déclencheurs a été surement l’expérience de ma mère qui à 40 ans a résolu de changer de vie pour se consacrer à sa passion : elle s’était remise aux études de l’histoire de l’art.
En 2013, je suis rejointe par une associée, Olivia de Smedt. Notre complémentarité et nos échanges apportent beaucoup à l’agence.
Peux-tu nous parler de tes activités ?
Nous sommes une agence de prod et de contenus culturels. Nous accompagnons plusieurs projets privés de référence du mécénat d’entreprise et de philanthropie. C’est un domaine qui me tient particulièrement à cœur et dont je promeus l’engagement. En tant que professionnelle de la communication et des médias, je dispose d’une expertise et d’un réseau solide que je mets au service de nos clients.
Nous travaillons pour des projets exigeants et incarnés. Nous privilégions des rapports personnalisés, directs et impliqués avec nos clients afin de leur apporter expertise et sincérité. Nous concevons avec eux des stratégies créatives en adéquation avec leur vision, leurs objectifs et leurs valeurs. Grâce à notre expérience du monde de l’entreprise, des marques et de l’écosystème culturel et au soutien d’un réseau actif et prescripteur, nous développons et faisons rayonner leurs projets.
Nous imaginons et pilotons des projets artistiques dans leur globalité. Cela passe par la conception, le sourcing, la direction artistique, les partenariats et la communication. Nous orchestrons la synergie de ressources créatives : commissaires d’exposition, directeurs artistiques, scénographes, artistes, designers, éditeurs, producteurs audiovisuels. Nous organisons des remises de prix, des vernissages et visites privées d’expositions, ou des lancements, soirées, dîners, conversations et conférences pour nos clients. Pour cela nous identifions et coordonnons des prestataires, concevons des contenus, les expériences et performances artistiques. Nous venons justement d’élaborer un événement pour célébrer les 60 ans de la maison de bougies diptyque.
Peux-tu nous donner des exemples qui t’ont marqué ?
Je parlerais de Bernar Venet qui est proche de votre région. Il a fait appel à nous dès l’ouverture de sa fondation pour faire connaître ce lieu hors du commun, et promouvoir les œuvres produites in situ chaque année, les agrandissements du parc de sculptures et les expositions estivales. Cette fondation est l’aboutissement de plus de 50 ans de création artistique et de ses rencontres avec des artistes majeurs, devenus ses amis. Il a transformé en 25 ans sa propriété du Muy dans le Var en une « œuvre d’art totale », un endroit extraordinaire.
En invitant les médias français et internationaux à vivre une expérience inoubliable, nous avons contribué également à faire découvrir une autre facette de lui : celle d’un des plus grands collectionneurs d’art minimal et conceptuel américain. La « Venet Foundation » a d’ailleurs reçu le Prix Montblanc pour la culture. Nous avons également accompagné Bernar Venet pour la communication des deux rétrospectives qui lui étaient dédiées en 2018 au MAC Lyon et au MAMAC de Nice, ainsi que celle de son exposition au Louvre Lens en 2021. Il nous réserve encore beaucoup de surprises avec des projets de grande ampleur dans les prochains mois.
Je citerai aussi la Fondation Bettencourt Schueller et la Fondation d’entreprise Martell avec qui nous nous sommes immergées depuis plusieurs années dans le monde de l’artisanat d’art. Ce sont des métiers merveilleux qui ont beaucoup de points communs avec les artistes.
Quels sont tes futurs challenges ?
Nous devons tout d’abord passer le cap de cette période difficile qui n’en finit pas. La culture n’est pas toujours considérée comme prioritaire dans ces moments de crise alors qu’elle l’est en réalité… Nous nous tournons de plus en plus vers des projets pluridisciplinaires, mêlant musiciens, chorégraphes, artistes contemporains, artisans d’art ou même botanistes. C’est une autre façon de voir le monde à travers ce prisme très éclectique. Je mesure la chance que j’ai de travailler sur des sujets aussi variés et de ne jamais me retrouver dans une routine.
Quelles sont les personnes qui t’inspirent ?
Dans la vie en général je citerai Simone Veil et Élisabeth Badinter. Elles nous ont toutes les deux montré le chemin, en réussissant en tant que femmes dans une société d’hommes. C’est à Simone Veil notamment que l’on doit la loi sur l’IVG, un avancement incroyable qui lui a valu de nombreuses menaces et intimidations. Dans « Vivre avec nos morts », que je viens tout juste de lire, Delphine Horvilleur a consacré un chapitre à Simone Veil et à son amitié avec Marceline Loridan qui m’a beaucoup touchée.
Aurais-tu un livre à nous conseiller ?
« La panthère des neiges » est un ouvrage merveilleux de Sylvain Tesson. Invité par le photographe Vincent Munier, il parcourt le Tibet oriental à la recherche de cet animal. Il apprend l’art de l’affût dans l’hiver et le silence. La tension est présente, car il y a la possibilité que la bête ne se montre pas. Dans notre monde de l’immédiateté, c’est tout l’inverse, l’éloge de l’espoir et de la patience. Nous pouvons passer des heures à attendre quelque chose qui ne viendra peut-être pas. C’est une magnifique référence à la relativité du temps.
En conclusion aurais-tu une devise ou un mantra ?
Je citerai « Soit toi-même, tous les autres sont déjà pris », d’Oscar Wilde. Nous devons nous libérer de toutes ces cases où l’on veut nous mettre. Arrêter d’attendre d’être parfaitement préparées ou de se penser parfaitement légitimes pour entreprendre quelque chose : quand on est passionnée, il faut se lancer sans retenue, une pincée de risque et de culot ne fait pas de mal.
Crédit photo Sylvia Galmot photographe