« Parlons d’IA » : à Monaco, l’intelligence artificielle se conjugue au féminin et au futur
Propos recueillis pas Pascale Caron
Le 17 avril 2025, le MWF Institute a donné rendez-vous aux acteurs de la tech à Monacotech pour une matinée exceptionnelle consacrée à l’intelligence artificielle. Intitulée « Journée de la femme digitale — Parlons d’IA », la rencontre a réuni, entrepreneures, ingénieures et leaders visionnaires autour d’une ambition commune : penser une IA éthique, inclusive, et porteuse de sens.
Pascale Caron, Secrétaire Générale du MWF Institute, a ouvert la conférence « Nous remercions chaleureusement Monacotech pour son accueil et CMB Monaco pour son précieux soutien à cette initiative. ». Patricia Cressot, Présidente de MWF Institute dans son introduction à rappelé les engagements de l’association et think tank, en faveur de la place des femmes dans les métiers de demain.
Un premier panel mettant à l’honneur les métiers de la tech
Pascale Caron, également co-auteure du livre L’EntrepreneurIA, a ensuite pris la parole en tant que modératrice. L’ouvrage qu’elle a co-écrit avec le Dr Yves-Marie Le Bay rassemble 100 témoignages d’entrepreneurs qui transforment leur secteur par l’intelligence artificielle. Cinq d’entre eux étaient présents ce jour-là à Monaco pour illustrer la diversité des usages, des parcours et des visions de l’IA : trois femmes et deux hommes engagés dans des initiatives résolument innovantes.
Laura Degioanni, responsable IA et Innovation chez Saas Office, a ouvert la discussion. Venue de la finance, elle s’est formée à la data science avant de rejoindre Accenture Labs, où elle a travaillé sur la confidentialité des données et la durabilité de l’IA. Aujourd’hui, elle pilote l’intégration de solutions d’intelligence artificielle adaptées aux besoins concrets des entreprises, tout en mettant l’accent sur la responsabilité environnementale.
Hala Najmeddine, Directrice de la Recherche chez Active Asset Allocation, incarne la transversalité entre les mondes de l’énergie, de la finance et de l’IA. Après un parcours scientifique dans des institutions telles que le CEA et EDF, elle s’est tournée vers la gestion d’actifs, apportant avec elle une expertise pointue en modélisation des signaux. Sa voix est également forte, dans la défense d’une plus grande représentativité des femmes dans les disciplines scientifiques.
Aïda Meghraoui, fondatrice d’AMKbiotech, incarne quant à elle une vision humaniste et scientifique de l’innovation. Pharmacien et Immunologiste, elle a lancé son entreprise pour accélérer la recherche sur des pathologies lourdes comme le cancer du foie. En combinant imagerie hyperparamétrique et analyse IA, elle ouvre la voie à une médecine personnalisée, plus rapide et plus précise.
Du côté des entrepreneurs de Monacotech, Louis, cofondateur d’Altores, développe des chatbots souverains pour les entreprises, misant sur la protection des données et l’automatisation intelligente. Andréa, cofondateur de Maliz.ai, s’appuie sur des modèles open source pour concevoir des IA personnalisables et souveraines. Leur credo : une IA locale, éthique, décentralisée, au service des utilisateurs.
Une conversation croisée structurée autour de deux grands thèmes
Les intervenants ont été invités à une discussion structurée autour de trois grandes thématiques.
L’IA au service de l’humain et de l’éthique
Tous ont insisté sur la nécessité de concevoir des solutions technologiques en adéquation avec les besoins sociétaux. « l’IA n’a de valeur que si elle répond à un usage utile et respectueux ». Ils ont souligné les enjeux de transparence dans la conception des algorithmes médicaux.
La place des femmes dans l’IA et la tech
L’ensemble du panel a appelé à une politique volontariste pour diversifier les talents dans la tech, dès le plus jeune âge.
Marco Landi : une vision européenne et humaniste de l’IA
Le second temps fort de la matinée a été l’intervention de Marco Landi, ancien COO d’Apple Monde et fondateur de l’Institut EuropIA. Dans un entretien captivant, il a partagé son parcours hors norme, depuis ses débuts chez Texas Instruments jusqu’à son rôle clé au retour de Steve Jobs chez Apple dans les années 1990.
Mais c’est surtout son engagement actuel qui a marqué l’auditoire : « L’Europe a une responsabilité historique : proposer une IA centrée sur l’humain, respectueuse de nos valeurs démocratiques. » À travers le WAICF (World AI Cannes Festival) et le WAiFF (World AI Film Festival), il entend créer des ponts entre technologie, culture et société. Pour lui, « l’IA doit rester un outil au service de la créativité humaine, jamais une fin en soi ».
Une matinée riche en contenus, porteuse d’avenir
Les questions du public, ont confirmé l’intérêt croissant de la communauté MWF Institute pour l’intelligence artificielle.
En conclusion, Pascale Caron a annoncé la prochaine parution du livre l’EntrepreneurIA, Conseils d’entrepreneurs aux éditions Ovadia, une synthèse passionnante des témoignages recueillis sur le terrain.
Cette « Journée de la femme digitale » a démontré qu’il existe une autre manière de penser l’IA : inclusive, éthique, locale, et portée par des talents divers. Dans un contexte de mutation rapide, où l’IA façonne déjà les usages et les imaginaires, ces voix incarnent une vision résolument européenne, lucide et tournée vers l’humain.
CWB, une soirée d’exception au Shangri-La: à l’honneur deux femmes du Luxe et de la Finance
Depuis sa création, le Cercle Wine Business, fondé et animé par Alain Marty, s’est imposé comme un rendez-vous incontournable pour les amateurs de vin et les acteurs du monde des affaires. Ce réseau exclusif, qui rassemble dirigeants, entrepreneurs et experts du secteur, offre une plateforme d’échanges privilégiée autour de la passion du vin et des dynamiques économiques qui l’entourent.
Le mardi 11 mars 2025, le Shangri-La Paris a accueilli une soirée d’exception où notamment deux femmes influentes du luxe, de la finance et de la gastronomie ont été mises à l’honneur. Animée par Alain Marty, cette rencontre a permis de découvrir le parcours et la vision de dirigeantes d’exception, parmi lesquelles Ariane de Rothschild, CEO du groupe Edmond de Rothschild, et Karin Nebot, Directrice générale de la Maison Kaviari.
Un Programme d’Excellence pour une soirée inoubliable
Les invités ont été conviés à une dégustation exclusive, mettant en avant des maisons emblématiques du savoir-faire français. Nous avons pu déguster les champagnes Barons de Rothschild, Maison Villevert, spécialiste des spiritueux d’exception, Maison Poilâne, icône de la boulangerie artisanale, Vignoble La Dourbie, domaine viticole engagé dans une viticulture durable.
Cette édition du Wine Business Club a accueilli des personnalités de premier plan, issues de différents horizons. Jean-Claude Lavorel, Président du Groupe Lavorel, Karin Nebot, Directrice générale de la Maison Kaviari, Florian Grill, Président de la Fédération Française de Rugby et enfin Ariane de Rothschild, CEO d’Edmond de Rothschild ont apporté leurs témoignages.
À travers des interviews captivantes, ces figures emblématiques ont partagé leur approche du leadership, leur vision stratégique et leur engagement pour l’innovation dans leurs secteurs respectifs.
Pour conclure cette soirée en beauté, un dîner gastronomique d’exception a été orchestré par :
Tony Xu, Chef 1 étoile au Guide Michelin e Quentin Testart, Chef Exécutif des cuisines du Shangri-La
Les plats ont été sublimés par une sélection de vins, du Domaine de La Dourbie, présentée par Laurent Graell, Directeur Général Adjoint du domaine.
Cette soirée du Wine Business Club a célébré le talent et l’audace de dirigeants visionnaires et de femmes d’influence, tout en offrant aux invités une expérience œnologique et gastronomique d’exception. J’ai été particulièrement intéressée par les interventions des Entrepreneures de renom, voic donc un compte rendu des interventions de ces deux femmes inspirantes.
Karin Nebot : À la tête de Kaviari, l’Excellence du Caviar Français
Karin Nebot, Directrice générale de la Maison Kaviari, a partagé sa vision du marché du caviar et son engagement pour préserver l’héritage et l’excellence de cette maison historique. Son intervention a mis en lumière les défis du secteur, l’évolution des modes de consommation et l’importance du savoir-faire artisanal dans un marché en pleine mutation.
Avant de rejoindre la Maison Kaviari, Karin Nebot a évolué dans l’univers du luxe et de la mode, chez Ralph Lauren et Cartier, où elle a occupé plusieurs postes stratégiques en marketing et communication. Cela lui a permis de développer une approche orientée marque et expérience client, qui se reflète aujourd’hui dans le positionnement de Kaviari sur le marché du caviar.
Elle a également travaillé en boutique et en filiale, notamment aux États-Unis et à Miami, ce qui lui a offert une vision internationale des attentes des clients du luxe. En rejoignant Kaviari en 2009, elle a relevé le défi de moderniser l’image de la marque tout en préservant l’authenticité et le prestige d’un produit d’exception.
Fondée dans les années 1970, la Maison Kaviari est aujourd’hui une référence incontournable dans le monde du caviar d’élevage. Avec l’interdiction du caviar sauvage en 2009, l’entreprise a su s’adapter aux nouvelles réglementations tout en conservant une qualité artisanale unique. Kaviari travaille avec les meilleurs élevages à travers le monde, notamment en France, en Italie et en Chine, les trois plus grands producteurs mondiaux de caviar d’élevage. L’objectif est de garantir une sélection rigoureuse et une traçabilité parfaite des produits.
Aujourd’hui, Kaviari propose une gamme variée de caviars, adaptés aux attentes des gastronomes et des chefs étoilés :
- Caviar Baeri : d’une grande finesse, appréciée pour sa texture délicate.
- Caviar Osciètre : plus iodé et complexe en bouche.
- Caviar Beluga : le plus prestigieux, à la texture fondante et aux notes subtiles.
- Caviar Kristal : variété très prisée, aux grains dorés et à l’intensité aromatique unique.
Chaque caviar est issu d’un processus de maturation spécifique, permettant de développer ses arômes et sa texture avant d’être mis en vente.
Kaviari adopte une stratégie de distribution exclusive, en privilégiant :
- 70 % du chiffre d’affaires de l’entreprise provient de la haute gastronomie, avec des collaborations avec les plus grands chefs étoilés du monde.
- Kaviari est présent dans des établissements emblématiques du luxe alimentaire.
- Les boutiques Kaviari situées principalement à Paris, offrent une expérience immersive aux clients en quête de découverte et d’exception.
Karin Nebot a insisté sur l’importance de l’expérience client dans l’univers du caviar. Contrairement à d’autres produits gastronomiques, il reste un mets de luxe souvent méconnu, et l’un des objectifs de Kaviari est d’éduquer le consommateur sur sa dégustation et son histoire.
Sous la direction de Karin Nebot, Kaviari a développé un concept unique de boutiques dédiées au caviar, où les clients peuvent découvrir les différentes variétés de caviar grâce à des dégustations guidées. Ils peuvent apprendre les meilleures associations culinaires pour sublimer le produit et participer à des ateliers immersifs avec des chefs spécialisés.
Ces boutiques offrent une expérience multisensorielle, qui va au-delà d’un simple achat. L’objectif est de démocratiser l’accès au caviar tout en maintenant son image d’exception et d’exclusivité.
Karin Nebot a souligné les défis auxquels fait face l’industrie du caviar. Notamment en raison ses réglementations strictes sur la pêche et l’élevage : depuis l’interdiction du caviar sauvage en 2009, les producteurs doivent respecter des normes drastiques pour garantir la traçabilité et la durabilité du produit.
La Chine étant aujourd’hui le premier producteur mondial, les guerres commerciales entre l’Europe et la Chine peuvent avoir un impact sur l’approvisionnement et les prix. Pour faire face à ces défis, Kaviari privilégie des contrats à long terme avec ses fournisseurs afin de garantir une stabilité des prix et une qualité constante.
Le marché du caviar connaît une évolution notable avec de nouveaux profils de consommateurs :
- Une clientèle plus jeune et curieuse, attirée par des expériences gastronomiques uniques.
- Un intérêt croissant pour des produits d’exception accessibles, notamment à travers des formats plus petits et des présentations innovantes.
- Une recherche de transparence et de traçabilité, avec une attention particulière portée aux méthodes d’élevage durables.
Face à ces nouvelles attentes, Kaviari innove avec des présentations plus adaptées, des recettes créatives et une communication axée sur le savoir-faire artisanal et l’authenticité.
En tant que Directrice générale, Karin Nebot joue un rôle clé dans l’évolution de Kaviari. Son expérience dans le luxe lui permet d’apporter une approche moderne et élégante à une maison historique.
Ariane de Rothschild : une visionnaire à la tête de l’empire Edmond de Rothschild
Ariane de Rothschild, Présidente du groupe Edmond de Rothschild, a ensuite partagé son parcours, sa vision du luxe et de l’innovation, ainsi que les défis liés à la gestion d’un empire familial. Entre finance, viticulture, hôtellerie et engagement humanitaire, elle incarne une approche moderne du leadership, fondée sur l’excellence et l’anticipation des grandes mutations économiques.
Née à San Salvador, d’une mère française et d’un père allemand, Ariane de Rothschild a grandi dans un environnement international qui a forgé sa vision globale du monde des affaires. Après des études en finance et commerce international, elle entame sa carrière aux États-Unis, travaillant notamment pour la Banque américaine Chase Manhattan et d’autres institutions financières.
Son approche pragmatique de la finance et sa capacité à anticiper les tendances économiques la distinguent rapidement. En 1999, elle rejoint Edmond de Rothschild Group, un acteur majeur de la gestion d’actifs et de la banque privée. Le groupe gère aujourd’hui plus de 180 000 clients à travers plusieurs filiales en Europe et au Moyen-Orient (France, Suisse, Luxembourg, Espagne, Italie, Israël, Émirats arabes unis…).
Devenue CEO en 2015, elle apporte une nouvelle dynamique au groupe, misant sur l’innovation financière, la diversification des investissements et le renforcement du positionnement sur les secteurs de l’hôtellerie et du luxe.
Le groupe Edmond de Rothschild, fondé en 1953, repose sur une double expertise : la gestion de fortune et les investissements à long terme. L’objectif est d’accompagner les grandes fortunes et les entreprises dans la structuration et la transmission de leur patrimoine.
Ariane de Rothschild insiste sur l’importance d’une approche sur mesure, adaptée aux besoins des entrepreneurs et des familles fortunées. Le groupe ne se contente pas de gérer des actifs, il structure les stratégies de croissance, conseille sur la gouvernance et l’optimisation fiscale, et facilite les transmissions d’entreprises familiales.
Un des enjeux majeurs qu’elle souligne est la nécessité d’adapter ces services à une clientèle de plus en plus jeune et tournée vers l’entrepreneuriat. La nouvelle génération de clients ne se contente plus d’un simple conseil financier : elle recherche une approche éthique, engagée et connectée aux tendances de durabilité et de responsabilité sociale.
Le nom Rothschild est indissociable de la grande tradition viticole. Dès les années 1970, la famille investit dans plusieurs domaines viticoles prestigieux, développant une stratégie axée sur la diversification et la qualité. Sous l’impulsion d’Ariane de Rothschild, le groupe possède aujourd’hui des vignobles en France (Bordeaux), en Argentine, en Afrique du Sud, en Nouvelle-Zélande et en Espagne. L’objectif n’est pas seulement de produire du vin, mais de réinventer l’approche viticole, en intégrant des techniques durables et en recherchant des terroirs d’exception. Cette diversification permet à la maison Edmond de Rothschild d’occuper une place unique sur le marché du vin de luxe, tout en capitalisant sur une image d’excellence et d’innovation.
Autre secteur clé du groupe : l’hôtellerie de prestige. Héritière d’une tradition initiée dès 1904 par la famille, Ariane de Rothschild a renforcé l’implantation du groupe dans l’hôtellerie haut de gamme, notamment à travers des partenariats stratégiques avec Four Seasons. Ces investissements dans l’hôtellerie de luxe s’inscrivent dans une vision long terme, où l’expérience client et l’art de vivre sont placés au cœur de la stratégie. Chaque établissement reflète l’ADN Rothschild, mêlant élégance, discrétion et raffinement, tout en intégrant des éléments contemporains pour séduire une clientèle exigeante.
Si le groupe Edmond de Rothschild est un acteur majeur de la finance et du luxe, il joue également un rôle clé dans le secteur philanthropique. Ariane de Rothschild poursuit une tradition familiale d’engagement, notamment à travers la Fondation Edmond de Rothschild, qui soutient des initiatives dans l’éducation, la recherche médicale et la culture.
Parmi les projets les plus emblématiques :
- La Fondation Ophtalmologique Rothschild, située à Paris, qui est un centre de référence dans le traitement des pathologies oculaires complexes, notamment celles liées au cerveau.
- Les Maisons d’Enfants Rothschild, qui accueillent et accompagnent des enfants en difficulté, perpétuant un engagement initié après la Seconde Guerre mondiale.
- Des projets éducatifs et culturels, visant à promouvoir l’égalité des chances et l’innovation sociale.
L’innovation médicale est un axe particulièrement stratégique pour Ariane de Rothschild. Elle souligne que les avancées en intelligence artificielle et en neurosciences révolutionnent les soins de santé, et la fondation s’efforce de financer des projets à fort impact dans ce domaine.
Ariane de Rothschild ne se contente pas de gérer un héritage familial. Elle impose sa propre vision, combinant rigueur financière, passion pour le luxe et engagement sociétal.
Sa capacité à allier tradition et innovation en fait une figure clé du capitalisme familial moderne. Elle se distingue par une approche pragmatique du business, en mettant en avant l’adaptabilité et la responsabilité sociale, deux piliers qui définissent aujourd’hui les grands leaders d’entreprise.
Son prochain grand projet : le lancement du Gitana 18, un trimaran volant ultra-innovant, qui incarne à la fois l’excellence technique et l’héritage sportif des Rothschild dans le monde de la voile. Ce projet illustre la recherche permanente d’innovation et de dépassement, qui caractérise le leadership d’Ariane de Rothschild.
A propos de l’auteur : Pascale Caron est membre du comité de MWF Institute et spécialiste de la technologie dans le domaine de la santé. Elle est CEO de la société Yunova Pharma, implantée depuis 2020 à Monaco et commercialise des compléments alimentaires dans la Neurologie.
Pascale est également directrice de rédaction de Sowl-initiative.
Assemblée Générale 2024 du Monaco Women in Finance Institute : retour sur une année de transformation
Le 16 décembre 2024, le Monaco Women in Finance Institute (MWFI) a tenu son assemblée générale annuelle, marquant une étape clé dans son développement. Ce rendez-vous a mis en lumière les réalisations de l’année écoulée et les ambitions renouvelées de l’institut pour l’année à venir. Avec un nouveau comité exécutif et des ambassadeurs engagés, MWFI poursuit sa mission de promouvoir une économie inclusive et durable.
Une année exceptionnelle pour MWF Institute et Sowl Initiative !
En 2023-2024, MWF Institute a organisé une série d’événements et d’interviews inspirants, abordant des thématiques majeures comme l’économie, la durabilité, la santé mentale et les innovations technologiques. Nos conférences ont réuni experts et visionnaires autour de sujets clés : protection des actifs digitaux, rôle des femmes dans l’économie, IA générative, durabilité et impact social.
Cette année a également été l’opportunité de développer des partenariats stratégiques : avec la Jeune Chambre Économique lors du Monaco Inspire, la Sohn Monaco Investment Conference, la projection de la pièce « Vivantes » et le Monaco Wealth Summit, renforçant encore notre présence et notre impact. Nous avons renforcé également nos actions avec notre partenaire historique Monacotech.
Parallèlement, 22 interviews réalisées dans notre Webzine Sowl Initiative, ont mis en lumière des personnalités inspirantes : Élisabeth Moreno, ancienne ministre engagée pour l’égalité des chances, Catherine Barba, entrepreneure et pionnière du numérique, Laurence Jenkell, artiste de renommée internationale, ou encore Nelly Chatou Diop, spécialiste en blockchain et finance digitale.
Ces entretiens ont exploré des sujets variés allant de la politique et la technologie, à l’art, au leadership féminin et à la blockchain.
Ces événements et ces rencontres ont témoigné de l’engagement de MWF Institute et de Sowl Initiative à aborder des thématiques ambitieuses et à ouvrir le dialogue sur des problématiques majeures. Nous remercions chaleureusement tous les participants, partenaires et intervenants qui ont contribué à la réussite de cette année.
Ensemble, nous avons renforcé notre vision commune : un monde plus inclusif, durable et orienté vers l’avenir.
Un nouveau Comité Exécutif
L’assemblée générale a officialisé la mise en place d’un nouveau comité exécutif, composé de professionnels passionnés et engagés :
- Patricia Cressot, Présidente : Cofondatrice de MWFI, elle reste le pilier stratégique de l’institut, guidant ses actions avec conviction et vision.
- Johanna Damar-Flores, Vice-Présidente : Leader reconnue, elle continue d’insuffler une dynamique d’innovation et d’inclusion.
- Giorgeth Le Guillouzic, Trésorière : Nouvelle arrivée, elle apporte une expertise précieuse dans la gestion et le développement des projets financiers.
- Sophie Schaad, Nouvelle responsable Administrative : Avec son approche rigoureuse, elle assure une organisation fluide et efficace des initiatives.
- Pascale Caron, Secrétaire Générale : La directrice de rédaction de Sowl Initiative, veille à la mise en œuvre des projets et à leur cohérence avec les valeurs de MWFI. Elle continuera à enrichir les partenariats.
- Jean-Claude Mourad, Relations Extérieures : Responsable du rayonnement de l’institut, il joue un rôle essentiel dans l’établissement de nouveaux partenariats.
Cette nouvelle équipe marque une étape de renouveau, combinant expérience et perspectives modernes.
Nelly Montanera, Aude Lefrevre Krumenacker et Julie Faure compléterons nos actions dans un comité Consultatif.
Les Ambassadeurs : figures de l’engagement
Les ambassadeurs de MWFI incarnent les valeurs de l’institut et participent activement à son rayonnement. Parmi eux : Michel Santi, Économiste, offre des analyses précieuses sur les défis macroéconomiques mondiaux, Jean-Pierre Petit, Président des Cahiers Verts de l’Économie, enrichit les débats avec son expérience dans les marchés financiers, Dr. Nathalie Hilmi, Chercheuse en économie durable, contribue à l’exploration des solutions aux enjeux climatiques et sociaux, Joana Foglia et Laurence Vanin, figures influentes dans leurs domaines respectifs, participent activement à l’élaboration de solutions innovantes. Maitre Stéphane Brabant et Andréa Calabro nous accompagnent également.
Ces ambassadeurs, par leur diversité et leurs expertises, renforcent l’impact des actions de MWFI à l’échelle locale et internationale.
Des partenariats stratégiques et une vision inclusive
MWFI a poursuivi son engagement auprès de nos partenaires stratégiques :
- Le Comité des Droits des Femmes, pour promouvoir des initiatives en faveur de l’égalité de genre.
- Monacotech, acteur clé de l’innovation.
- AMFID et MEB (Monaco Economic Board), élargissant les opportunités d’échanges économiques et institutionnels.
- Le Lions club de Monaco avec qui nous nous engageons dans des action caritatives.
Ces partenariats ont permis à MWFI de renforcer sa visibilité et son influence dans des secteurs variés.
Avec un nouveau comité exécutif, des ambassadeurs influents et des projets ambitieux, MWFI a franchi une étape importante en 2024. L’institut s’impose comme un acteur incontournable des réflexions économiques et sociétales, en rassemblant des leaders autour d’une vision commune : construire un avenir plus équitable et durable. Rendez-vous en 2025 pour poursuivre cette dynamique !
Élisabeth Moreno : Leadership et Impact au Féminin
Interview d’Elisabeth Moreno pour Sowl Initiative by MWF Institute.
Propos recueillis par Pascale Caron
Est-il besoin de présenter Élisabeth Moreno : ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances de 2020 à 2022. Elle a passé la majeure partie de sa carrière dans le monde de l’entreprise, de cheffe d’entreprise aux multinationales technologiques, sur quatre continents (États-Unis, Asie, Europe, Moyen-Orient et Afrique).
En 2018, elle devient vice-présidente du groupe Hewlett Packard en charge du continent africain. Autant de raisons pour moi de la contacter sur LinkedIn et c’est avec une joie non dissimulée que je vous livre notre discussion passionnée.
Au sein de notre équipe chez Monaco Women In Finance, vous êtes un vrai rôle modèle et je mesure ma chance de pouvoir échanger avec vous.
Je vous remercie Pascale, c’est également un plaisir pour moi d’échanger avec vous depuis Monaco ! J’aime beaucoup encourager les femmes qui me disent : « Je ne suis pas assez importante ou connue pour faire ça. » Je leur réponds toujours : « Arrêtez de penser que votre manque de notoriété vous empêche d’accomplir de grandes choses. Si vous pensez être trop petite pour changer le monde, essayez de dormir avec un moustique dans une chambre et vous verrez l’impact qu’il peut avoir. »
Je tiens à vous féliciter pour la création de Monaco Women in Finance, car nous avons plus que jamais besoin d’unir nos forces, nos compétences et nos expertises pour faire avancer les droits des femmes. Le combat est loin d’être gagné.
D’abord parce que les mouvements masculinistes ne nous laissent aucun répit. Il semblerait que nous perturbions les hommes, en les confrontant aux injustices que nous subissons depuis des siècles. Certains en prennent conscience et agissent pour changer les choses, tandis que d’autres opposent une résistance marquée.
Ensuite parce qu’affirmer aux femmes qu’elles détiennent le pouvoir de transformer leur vie peut représenter une charge considérable. Cela peut être un fardeau lourd à porter, et il est parfois plus aisé de penser que l’on n’a pas de prise sur les événements.
Mon expérience en tant qu’aînée d’une grande famille, m’a convaincue que le succès se multiplie lorsqu’il est partagé. Étant encore trop peu nombreuses à occuper des postes à responsabilités, il est essentiel de nous soutenir mutuellement. Je crois fermement qu’une fois cette solidarité féminine bien ancrée, de nombreux changements s’opéreront.
Abordons votre parcours. On connaît votre travail en tant que ministre, mais j’aimerais écouter ce qui vous a amenée à la direction de HP Afrique. Un thème qui nous tient à cœur chez MWF Institute, c’est inspirer les jeunes filles à se tourner vers les métiers de la Tech et vous êtes sans conteste une icône.
C’est essentiel de montrer que la Tech est un domaine accessible à toutes et à tous. Aujourd’hui encore plus que lorsque j’ai démarré il y a 20 ans.
J’ai débuté ma carrière en créant une entreprise dans le secteur du bâtiment à l’âge de 20 ans. Après une décennie, j’ai saisi l’impact transformateur du numérique et décidé de m’y investir pleinement. J’ai donc rejoint France Télécom, sans aucune expertise dans les télécoms, mais convaincue que la technologie et en l’occurrence internet, allaient redéfinir notre manière de travailler, d’étudier, de communiquer et de s’informer. Le poste de manager que j’ai accepté alors était une opportunité d’apprendre et d’explorer un secteur qui m’était étranger.
J’ai ensuite été recrutée par Dell, plus pour mon leadership et ma capacité à construire des équipes performantes que pour mes compétences techniques.
Un moment clé dans mon développement fut lorsque, après avoir âprement défendu mes équipes pour des augmentations salariales, un supérieur m’a dit que je ne réussirais jamais dans ce domaine parce que j’étais « trop humaine ».
Ce commentaire a renforcé ma conviction du management : le respect et la considération pour nos équipes sont essentiels à la réussite. Ce sont eux qui font la réussite d’une organisation. J’ai toujours dirigé en restant fidèle à mes valeurs, et je suis heureuse que l’avenir m’ait donné raison. Le succès vient avant tout des personnes avec qui nous travaillons, nous avons donc tout intérêt à les traiter correctement.
Après 12 ans chez Dell, Lenovo m’a sollicitée, m’offrant l’opportunité de découvrir une entreprise asiatique en pleine expansion. J’ai saisi cette chance, tout en menant un combat pour la parité et la diversité au sein des équipes. J’ai fixé un objectif ambitieux de 50 % de femmes en trois ans, et malgré le scepticisme initial, nous avons attiré des talents en créant un environnement ouvertement inclusif et inspirant.
Quelques années plus tard, HP m’a proposé de diriger leurs activités en Afrique, réalisant ainsi mon rêve de contribuer au développement technologique du continent. La pandémie m’a rapprochée des communautés expatriées, et c’est ainsi qu’à travers un concours de circonstances, mon engagement et mes valeurs m’ont menée à une carrière politique, un chemin que je n’avais jamais envisagé.
Pour ma part vous avez m’avez vraiment réconciliée avec la politique, car vous aviez un franc-parler.
Merci, j’en suis sincèrement honorée, car il faut que nous toutes et tous nous intéressions à la politique si nous voulons que les choses changent.
Vous avez raison de souligner que la sincérité, la spontanéité et la franchise ne correspondent pas aux codes traditionnels de la politique. Mais cela ne m’importait guère, car je n’avais aucune intention de bâtir une carrière politique. Si tel avait été mon objectif, j’aurais certainement dû adapter mon comportement, parce que pour réussir dans un environnement, il est nécessaire d’en accepter les règles. J’aime comparer cela au football : si vous voulez changer les règles du jeu, il faut être sur le terrain, pas rester dans les gradins en spectateur. Il est essentiel de faire ses preuves avant de prétendre pouvoir influencer les choses. En ce qui me concerne, je suis entrée en politique par conviction, et non par ambition. Je m’étais promis de rester fidèle à mes valeurs, sans me conformer pour plaire ou durer. Avec le recul, je me félicite de ce choix : beaucoup de celles et ceux qui me respectent aujourd’hui le font en partie parce que je suis restée fidèle à moi-même tout au long de mon parcours politique.
Quelles sont les actions dont vous êtes le plus fière, durant ces deux années au gouvernement ?
Je suis particulièrement fière d’avoir apporté une approche entrepreneuriale dans un ministère traditionnellement axé sur le militantisme et l’activisme. Forte de mon expérience d’entrepreneure, j’ai voulu introduire une dimension pragmatique. On me disait souvent : « Votre ministère, c’est celui de la parole. » À cela, je répondais : « Je vais en faire un ministère de l’action. » Je n’étais pas là pour simplement parler, bien que la parole soit cruciale, notamment lorsqu’il s’agit de lutter contre des inégalités profondément ancrées. Certes, il fallait exposer et dénoncer, mais je tenais surtout à voir des résultats concrets.
C’est dans cet esprit que j’ai contribué à la loi portée par Marie-Pierre Rixain, visant à instaurer des quotas pour briser les plafonds de verre, dans l’accès aux postes de direction. Grâce à la loi Copé-Zimmermann, des progrès avaient déjà été réalisés au sein des conseils d’administration. Le moment était venu d’étendre ces avancées aux COMEX et CODIR. J’ai donc investi toute mon énergie dans ce projet de loi, et bien qu’il ait fallu partir de très loin, celle-ci a finalement été adoptée.
J’ai également beaucoup travaillé sur les questions de violences sexistes et sexuelles, notamment pour la protection des victimes de violences conjugales, ainsi que leurs enfants. N’oublions pas que tous les 3 jours une femme meurt en France sous les coups de son conjoint ou de son ex. Nous avons mis en place des bracelets antirapprochement, nous avons doublé le nombre de places d’hébergement pour accueillir les victimes… c’est un travail de longue haleine.
Nous avons aussi porté la réforme des pensions alimentaires, un sujet crucial pour les familles monoparentales, dont 85 % sont soutenues par des femmes. Désormais, même en cas de non-paiement par le père, la CAF garantit le versement de la pension et se charge de récupérer les sommes dues. Un autre projet qui me tenait à cœur était l’ouverture de la PMA à toutes. Alors que depuis une décennie, les femmes mariées avaient accès à la procréation médicalement assistée, les femmes célibataires ou lesbiennes en étaient toujours exclues. Je ne comprenais pas comment une telle injustice pouvait persister. Nous avons donc œuvré pour cette loi, et je suis fière du résultat. J’ai également contribué à la gratuité de la pilule contraceptive pour les jeunes femmes jusqu’à 25 ans. Nous avons aussi légiféré contre les thérapies de conversion, pratiques inhumaines qui visaient à « guérir » des jeunes de leur orientation sexuelle, considérée à tort comme une maladie. Parmi les autres mesures concrètes en faveur de l’égalité des chances, j’ai lancé une plateforme de lutte contre les discriminations, en partenariat avec la défenseure des droits, Claire Hedon. Le but était que les personnes maltraitées ne soient pas abandonnées à leur sort.
Ces initiatives ont eu un impact concret dans la vie des gens, ce qui était ma priorité. Bien que mon temps en politique ait été bref, j’ai mené des combats significatifs, qui ont donné du sens à mes engagements de toujours.
Je n’aurais jamais pu obtenir ces résultats sans la coopération des entreprises et associations très engagées. En politique, on ne réussit jamais seul, surtout sur des sujets aussi complexes et vitaux. C’est grâce à ces partenariats que j’ai pu faire progresser tous ces projets qui me tenaient à cœur.
Cette expérience m’a profondément éclairée sur plusieurs sujets ; D’abord les dynamiques du pouvoir au plus haut niveau, et la complexité de la gestion d’un pays comme le nôtre. La France est un grand pays que l’on ne valorise pas toujours à sa juste mesure.
Parlez-nous donc de vos challenges actuels.
Je suis arrivée à un moment de ma vie où je veux recentrer mon énergie sur les sujets qui me passionnent le plus. L’un d’eux est l’impact de l’économie sur les enjeux sociaux et environnementaux de notre époque. C’est pourquoi j’ai rejoint Ring Capital, un fonds d’investissement qui soutient des hommes et des femmes en Europe et en Afrique. Nous sommes tous engagés dans la résolution de problématiques sociales telles que la santé, l’éducation, l’inclusion financière, ainsi que des enjeux cruciaux liés à la transition énergétique et environnementale.
Ces secteurs, bien que fondamentaux, ont souvent du mal à attirer des financements, car les investisseurs traditionnels les perçoivent comme relevant de l’économie sociale et solidaire, donc peu rentables. Pourtant, j’y crois fermement, et c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de m’investir pleinement dans ces causes.
En parallèle, j’accompagne également de grandes entreprises sur les enjeux ESG (Environnement, Social, Gouvernance). Depuis plus d’une décennie, ces sujets gagnent en importance et la réglementation devient de plus en plus complexe. Certaines entreprises sont prêtes à agir, mais ne savent pas toujours comment le faire efficacement. J’interviens donc auprès des CEO, COMEX et CODIR pour les aider à élaborer et à mettre en œuvre des stratégies ESG concrètes et impactantes. Cela constitue un volet central de mon activité professionnelle.
Je poursuis aussi mes engagements philanthropiques en tant que présidente de la Fondation Femme@numérique et j’ai co-fondé il y a deux ans l’association La Puissance du Lien.
Durant mon expérience politique, j’ai pris conscience de la fragmentation croissante de notre société, exacerbée par de multiples crises. Je suis convaincue que la seule façon de relever nos défis est de travailler ensemble, en intelligence collective. Il est impératif de mobiliser des talents divers et de renforcer la solidarité à tous les niveaux : entre femmes et hommes, entre territoires, et entre générations. C’est précisément ce que nous faisons avec La Puissance du Lien. Nous créons des passerelles et renforçons la cohésion pour affronter les grands défis de notre temps. Nous organisons des conférences ouvertes à tous, nous mettons le mentorat, l’entraide et la solidarité au cœur de nos actions. Nous préparons aussi un événement majeur autour du 8 mars, centré sur la place des femmes, auquel les hommes sont bien entendu invités. Il est crucial qu’ils comprennent le rôle essentiel qu’ils ont à jouer dans la lutte pour l’égalité.
Quelles sont les personnes qui vous ont le plus inspirée dans votre carrière ?
Elles sont nombreuses, mais deux figures se distinguent particulièrement : Simone Veil et Nelson Mandela. Ce qui les rend si importants à mes yeux, c’est leur résilience et leur humanité. Tous deux ont traversé des épreuves d’une gravité exceptionnelle, des souffrances à la fois personnelles et historiques, et malgré cela, ils ont su préserver leur humanité et l’utiliser au service du bien commun. Je trouve cela profondément admirable, car peu d’individus possèdent cette capacité. Leur force et leur engagement montrent qu’il est possible de surmonter des obstacles immenses tout en restant fidèle à ses principes.
Simone Veil, avec une carrière remarquable, et Nelson Mandela, qui après 27 ans de prison est devenu le président d’un pays marqué par l’apartheid, incarnent des exemples exceptionnels. Leur parcours prouve qu’en dépit des circonstances les plus adverses, il est possible non seulement de survivre, mais aussi d’apporter un changement profond dans le monde.
Ce qui m’inspire chez eux, c’est autant leur dévouement envers les autres que leur capacité à réaliser des accomplissements extraordinaires. Ils ont démontré que pour atteindre de grands objectifs, il faut à la fois une ténacité inébranlable et un profond respect de l’humanité.
Auriez-vous un livre à nous conseiller ?
Je vous recommande « Sapiens » de Yuval Noah Harari. Cet ouvrage captivant explore l’évolution de l’humanité, de nos origines à l’ère moderne. Ce qui le rend particulièrement intéressant, c’est sa capacité à nous éclairer sur les grandes étapes qui ont façonné notre société, tout en nous offrant des clés de lecture à une époque où nous perdons parfois nos repères. Harari nous pousse à réfléchir sur notre passé pour mieux comprendre les défis de notre avenir.
Et je viens de commencer le livre d’Anne Dufourmantelle, « L’Éloge du risque », qui mène une réflexion profonde sur l’importance du risque dans nos vies. La tendance contemporaine est de rechercher la sécurité et d’éviter les dangers à tout prix. À contrario, elle démontre que les différentes formes de prise de risques — dans l’amour, la création, la pensée, sont précisément ce qui nous connecte à notre liberté et nous permettent de vivre pleinement.
Quelle est votre devise ou votre mantra ?
J’en ai plusieurs 😊
J’aime beaucoup la citation « Visez toujours la lune, vous atteindrez peut-être les étoiles ». Elle me rappelle que chacun peut aspirer à de grandes choses, et même si nous n’atteignons pas exactement nos objectifs, l’essentiel est de viser constamment plus haut que notre point de départ.
Une autre : « La vie te présentera déjà suffisamment de défis, ne t’en impose pas plus que nécessaire. » Nous avons parfois tendance à être très durs envers nous-mêmes. Il faut être bienveillants à notre égard pour pouvoir surmonter certaines épreuves.
Je crois aussi en cette idée issue de l’écrivaine Toni Morison : « Si tu veux lire un livre qui n’a pas encore été écrit, écris-le toi-même. » Si cela est possible, ne pas attendre que d’autres créent ou réalisent nos souhaits, en d’autres termes, être maîtresses et maîtres de notre destin.
A propos de l’auteur : Pascale Caron est membre du comité de MWF Institute et spécialiste de la technologie dans le domaine de la santé. Elle est CEO de la société Yunova Pharma, implantée depuis 2020 à Monaco et commercialise des compléments alimentaires dans la Neurologie.
Pascale est également directrice de rédaction de Sowl-initiative.
Women In Tech
Interview d’Angela Naser Directrice de Women In Tech France.
Propos recueillis par Pascale Caron.
Angela est une figure influente dans le domaine de la technologie et de la finance, avec une carrière marquée par des rôles de leadership dans diverses organisations internationales. Depuis décembre 2023, elle est Directrice de Women In Tech France, une organisation mondiale, qui promeut l’inclusion, la diversité et l’équité dans les secteurs de la Science, Technologie, Ingénierie, Arts et Mathématiques. Women In Tech, est active dans 48 pays et compte plus de 200 000 membres, visant à combler l’écart entre les sexes et célébrer les réalisations des femmes et des hommes dans la technologie.
Angela Naser occupe également un poste important aux Nations Unies. Depuis 4 ans, elle y a été CFO, et consultante internationale senior en finance, banque digitale et gestion du changement. Elle a supervisé la coordination des opérations de financement, la gestion de crises, la refonte des écosystèmes numériques et l’amélioration des processus internes et externes.
Elle a auparavant dirigé des équipes chez General Electric Money Bank en tant que COO, et a géré des projets de développement commercial, de transformation digitale et des projets Green Belt Lean Six Sigma.
Angela a également été CMO et COO pour le déploiement européen de la banque digitale et néobanque du Groupe BPCE.
Elle a été impliquée dans des initiatives de transformation digitale et stratégique, pour la Présidence de la République française.
En plus de ses rôles dans le secteur financier, Angela a été nommée pour le Prix de La Femme digitale de l’année en 2019. Elle a aussi contribué au documentaire « Global Thought Leaders » sur CBS, mettant en lumière son expertise et son influence dans le domaine de l’innovation et du changement.
J’ai eu l’occasion de la rencontrer à Vivatech et j’ai immédiatement voulu en savoir plus.
Peux-tu nous expliquer ton parcours ?
Je suis arrivée en France de Syrie quand j’avais 8 ans. Mes 2 parents sont dentistes et ils sont venus en France pour terminer leurs études et pour me soigner, car j’ai eu la polio qui m’a handicapé des jambes. On s’est donc retrouvés en France pour achever mon traitement qui a duré 2 ans. J’ai étudié à l’école irakienne à Paris, un lycée diplomatique qui n’existe plus, pas loin du Trocadéro. J’ai fait toutes mes études en arabe et j’ai appris le français en lisant des livres.
Et puis mes 3 frères sont nés et nous sommes restés. Ils étaient à l’école française et j’ai découvert à travers eux, l’histoire de France. J’ai une citation de Romain Gary que j’aime beaucoup, je la répète souvent, car elle me résume bien : « Je n’ai pas une goutte de sang français, mais la France coule dans mes veines ». Mes parents m’ont eue, très jeunes, ils avaient 21 ans et 20 ans et demi, on a donc grandi ensemble. Quand on est arrivés, on habitait juste en face de la Sorbonne, on a découvert les musées parisiens. Nous étions émerveillés par ce lieu de liberté, car nous venions d’un pays où ce mot n’existait pas.
Mon père est Syrien et ma mère Libanaise. Quand on est venu en France, c’était le début de la guerre au Liban. J’ai vécu mon premier attentat à 5 ans. C’est des souvenirs que je ne souhaite à personne en tant qu’enfant parce que ça nous fait grandir d’un coup. Dieu merci, mes frères n’ont jamais vécu ça.
J’ai eu mon bac à 16 ans, je suis rentrée en médecine à Paris 5, mais j’ai échoué au concours. J’avais une furieuse envie de travailler de retourner en Syrie. Pour financer mes projets, j’avais commencé à faire des petits boulots en usine, en tant que caissière, et pour Pizza Hut. Chez eux, j’ai bossé dans un point de vente, et le manager de l’époque m’a beaucoup inspirée. Il était tellement bienveillant. Il m’a montré qu’on ne travaille pas pour une boite, mais pour une personne. Lorsque j’ai loupé mon concours, mon père l’a su parce qu’il connaît tout le monde à l’université. Dans sa tête, il s’est dit que j’allais recommencer. Au Moyen-Orient, quand on ne fait pas médecine, ingénieur ou droit, c’est qu’on a raté sa vie. Surtout le commerce ! Mais j’ai pris un crédit étudiant et c’est mon manager à Pizza Hut qui a été ma caution. J’ai fait un BTS de commerce international. Mes parents l’ont découvert 6 mois après, j’avais donc une pression très grande pour réussir suite à mes choix personnels. J’ai terminé mes études par un DEESMI (Diplôme Européen d’Études Supérieures en Marketing International).
Mon premier job en tant que manager était à Norwich Union, une entreprise anglaise qui n’existe plus. Mon rôle était d’appeler les clients le jour de leurs 50 ᵉ anniversaire pour leur vendre une assurance obsèques. Après cette expérience, tu peux tout vendre !
Et puis je suis arrivée chez General Electric, Capital Finance, vraiment par hasard. Je ne savais pas ce qu’étaient un décompte et un tableau d’amortissement. Et j’ai eu de la chance de tomber sur une femme extraordinaire qui m’a recrutée. J’avais 23 ans et demi et 6 mois après, j’étais manager de la section la moins cool de la finance : le recouvrement automobile. Dans cette entreprise américaine, on m’a donné ma chance et j’ai gravi les échelons jusqu’à terminer COO.
J’ai toujours refusé d’avoir un bureau afin d’être immergée au sein de mon équipe. Je n’affichais jamais mes Awards, parce que je suis tout à fait consciente qu’on peut être au top un jour et qu’un rien suffit pour que la situation bascule. Et c’est ce qui m’est arrivé. J’ai changé de manager et j’ai vécu sous sa coupe 4 années horribles.
Cette personne m’avait sorti à plusieurs reprises lors de nos réunions : « Tu veux prendre ma place ? » Et un jour, au bout de la septième fois, je lui dis : « Non, j’ai plus de prétentions que cela. » Je ne pouvais pas partir, car je me devais de montrer l’exemple à mon équipe. Je pensais à l’époque que l’on peut avoir des obstacles et des personnes malveillantes dans notre parcours professionnel, mais que l’on doit tenir bon.
C’était une grave erreur et j’en ai payé le prix cher, car j’ai fait un AVC. Quand je me suis réveillée à l’hôpital, mon premier réflexe a été de demander le code wifi à l’infirmière pour pouvoir travailler. C’était mon premier arrêt maladie. J’ai eu tellement honte que je me suis arrêtée 2 mois sans en parler à personne. Ma famille l’a su des années plus tard. J’ai même menti à ma meilleure amie à qui je dis tout. Je suis quand même retournée au bureau et ce n’est que quelques années plus tard que j’ai quitté General Electric. Avec du recul, je me demande encore pourquoi je me suis infligé ça. J’ai géré, sur les 5 dernières années, 4 plans sociaux. Quand je suis partie, j’ai voulu reprendre mes études et me suis inscrite à HEC Paris et à Yale University.
Et c’est à ce moment que tu es devenue entrepreneure ?
Oui, j’ai créé 2 entreprises. La première, je me suis associée à l’ambassade de France et les CCI des émirats et de l’Arabie Saoudite, pour aider les sociétés françaises à s’installer là-bas. J’ai ensuite créé une affaire pour encourager les expatriés français à investir dans les startups et l’immobilier en France. Elles existent toujours, mais je ne m’en occupe plus.
En 2016, un des derniers dossiers que j’avais gérés à General Electric, c’était le rachat d’Alstom par GE. C’est là que j’ai la connaissance du ministre du Budget de l’époque : monsieur Emmanuel Macron. Quand il a lancé le « Mouvement En Marche », ses équipes m’ont contactée. Le QG était juste à côté de chez moi. Ils m’ont demandé au début de vérifier leur stratégie digitale. Et je me suis prise au jeu : j’ai fait la campagne digitale de monsieur Macron, et après, j’ai travaillé pour Gabriel Attal. Je le connais depuis très longtemps, car c’est mon voisin. Je me suis occupée de la campagne législative de monsieur Attal en 2016 et 2022.
Ensuite, Revolut m’a contactée pour leur lancement en France, pour leur stratégie digitale en 2016-2017. Et à la suite de tout ça, je suis rentrée à la BPCE. Je les ai rejoints en tant qu’externe et 3 mois après, ils m’ont proposé de devenir COO et CMO de la nouvelle entité qui s’appelle Ixion. J’ai quitté BPCE quelques semaines avant la COVID : je voulais travailler pour le secours catholique et les Restos du Cœur. Malheureusement, la COVID est arrivée et ils ont dû arrêter les contrats. Je suis toujours bénévole pour eux.
J’ai souvent osé dans la vie : un soir d’insomnie, je postule à une offre de très haut niveau aux Nations Unies. Ils m’ont contactée 8 mois après, mais pas du tout pour être numéro 3 des Nations Unies ! Je travaille depuis pour eux en tant que freelance.
En 2023, j’étais au Sommet global de Women in Tech et j’ai fait la connaissance d’Ayumi Moore Aoki, la CEO et Fondatrice de Women In Tech. On a eu un coup de foudre amical et professionnel. Des mois plus tard Ayumi a eu le désir de lancer Women in Tech en France. J’ai accepté d’en prendre la direction avec un immense honneur. Chez Women in Tech, je souhaite vraiment axer notre travail sur la jeunesse. Après plusieurs essais infructueux avec les lycées, nous avons noué des contacts très prometteurs pendant VivaTech.
Quels sont tes prochains challenges ?
Le premier objectif est de réussir à organiser notre Hackathon, Women in Tech à la rentrée. Nous désirons également orchestrer un programme de mentorat en France. Nous avons mis en place un partenariat avec l’académie de Créteil pour aider les élèves de seconde à trouver des stages. Et, bien sûr, je continue mon contrat avec les Nations Unies.
Est-ce que tu aurais un livre à nous conseiller ?
J’ai deux bouquins que j’adore : « L’Alchimiste » de Paulo Coelho et, dans un tout autre genre, « Le Parfum » de Patrick Süskind. Ils m’ont profondément marquée, chacun à sa manière.
L’Alchimiste, écrit par Paulo Coelho, est un véritable chef-d’œuvre de la littérature contemporaine. Coelho s’est inspiré de deux livres emblématiques : Le Petit Prince de Saint-Exupéry et Le Prophète de Khalil Gibran. À travers l’histoire d’un jeune berger andalou en quête de sa légende personnelle, Coelho nous invite à explorer les profondeurs de notre âme et à suivre nos rêves, malgré les obstacles. « Nous cherchons tous le bonheur, mais sans savoir où, comme les ivrognes qui cherchent leur maison, sachant confusément qu’ils en ont une. ».
« Le Parfum », de Patrick Süskind, est un autre livre qui m’a fascinée. Ce roman sombre et envoûtant nous plonge dans la France du XVIIIe siècle, suivant la vie d’un personnage singulier doté d’un sens olfactif exceptionnel.
Quelles sont les personnes qui-t-on inspirée dans ta carrière ?
J’aurais tellement voulu rencontrer trois personnes dans ma vie. Tout d’abord, Simone Veil, qui incarne à mes yeux la quintessence du phœnix. Sa résilience, son courage et son engagement sont des sources d’inspiration profondes pour moi. Ensuite, Gisèle Halimi, une femme extraordinaire dont le combat pour les droits des femmes résonne encore aujourd’hui. Et enfin, dans un tout autre registre, Jean d’Ormesson. Je suis littéralement amoureuse de ce monsieur. Son esprit, son charme et sa manière de voir le monde me fascinent.
Et puis, plus proche de moi, je pense à ma grand-mère, une femme extraordinaire. C’est elle qui m’a élevée, elle m’a appris la résilience et la persévérance et à toujours voir le bon dans le monde. C’est une sainte à mes yeux, elle me disait toujours : « fonce pour que tu n’aies jamais ni remords ni regrets. »
Mes deux directrices à General Electric (Isabelle Meghnagi et Joséphine Albanese), deux femmes qui ont beaucoup marqué mon parcours professionnel. Elles m’ont donné ma chance, m’ont challengé et surtout fait confiance. Elles ne le savent peut-être pas, mais je parle souvent d’elles. Leur soutien et leur mentorat ont été cruciaux dans mon développement et ma réussite.
Aurais-tu une devise ou un mantra ?
C’est la citation de Nelson Mandela : « Je n’échoue jamais, soit je réussis, soit j’apprends ».
L'équipe Women In Tech à Vivatech
A propos de l’auteur : Pascale Caron est membre du comité de MWF Institute et spécialiste de la technologie dans le domaine de la santé. Elle est CEO de la société Yunova Pharma, implantée depuis 2020 à Monaco et commercialise des compléments alimentaires dans la Neurologie.
Pascale est également directrice de rédaction de Sowl-initiative.
[New Deal] entre deux mondes
Interview de Fatou Sagna Sow, figure emblématique du panorama socio-économique et politique franco-sénégalais et fondatrice du cabinet, New Deal Consulting.
By Pascale Caron
Née à Paris, Fatou incarne une dualité culturelle, à la fois française et sénégalaise, qui a profondément marqué son parcours. Suite à une carrière réussie dans le secteur bancaire français, et chez de prestigieux cabinets d’avocats parisiens, Fatou a décidé de retourner au Sénégal, mue par le désir de contribuer à son essor économique et social.
Au Sénégal, elle s’est vite distinguée en tant que femme engagée et influente, devenant Conseillère technique auprès de l’ex-Premier Ministre, Dr Aminata Touré, au Conseil Économique Social et Environnemental. Elle est forte d’un bagage académique impressionnant. Droit des affaires, droit du multimédia et des systèmes d’information, ainsi qu’un Master spécialisé en gestion des télécommunications, Fatou a également rejoint l’Executive MBA de l’University of Chicago’s Booth School of Business.
Sa passion pour la politique s’est exprimée à travers divers engagements. Elle a été membre de la section Île-de-France du parti sénégalais AJ/PADS, conseillère municipale à Mantes-la-Ville, et référente du mouvement La République en Marche au Sénégal. Au-delà de la politique, Fatou a piloté d’importants projets de développement économique, illustrant son engagement pour l’innovation et le leadership féminin en Afrique. Nous étions donc impatients d’en apprendre davantage sur ses nouveaux défis avec New Deal Consulting.
Fatou, pourriez-vous nous parler de votre parcours et de vos projets ?
Je me suis intéressée au Sénégal dès les années 2000, choisissant de m’engager en politique sénégalaise tout en étant basée en France. Ainsi, j’ai milité pour un parti politique sénégalais auprès de la diaspora sénégalaise en France, ce qui m’a permis de côtoyer de nombreux décideurs politiques et membres de la communauté sénégalaise. Vivant à Paris et ayant étudié là-bas, je ressentais le besoin de renouer avec mes racines. La politique m’a semblé être le moyen de participer à la gestion de la société, de travailler avec d’autres personnes et de trouver des solutions aux problèmes sociaux. En 2016, j’ai quitté la France, à la recherche d’un changement et désireuse de voir ce que je pouvais accomplir en me mettant au défi. Cela m’a menée au Sénégal pour explorer le domaine du développement économique et me challenger personnellement.
Votre famille vous a-t-elle suivi ?
Oui, mon mari travaillait déjà à Dakar et faisait des allers-retours. Nous sommes partis avec nos deux jumeaux de cinq ans, qui ont découvert le pays. Je crois qu’ils sont très heureux aujourd’hui et je les considère souvent comme des « enfants du soleil ». Je suis ravie de les voir s’épanouir au Sénégal.
À mon arrivée, j’ai rejoint une ONG, sur divers sujets de développement, de transfert de technologie, d’accompagnement et de structuration de projets. J’ai ensuite été nommée conseillère technique auprès de l’ancienne Première Ministre Aminata Touré, au Conseil économique, social et environnemental. J’ai abordé de nombreux thèmes enrichissants, tels que le leadership féminin, la culture, le sport, le numérique, l’économie verte et l’économie bleue. Quelle expérience gratifiante !
Depuis, j’ai fondé mon cabinet, New Deal Consulting, dans l’idée de valoriser cette double culture qui est la mienne. Il y a beaucoup de jeunes talentueux au Sénégal. Chaque année, 300 000 jeunes sortent du système scolaire, mais malheureusement, peu trouvent un emploi qui corresponde à leur valeur.
L’objectif est de créer des liens et des opportunités dynamiques. Je pense qu’il est important de connecter les jeunes compétents d’ici, qui connaissent bien l’environnement local, avec ceux de l’étranger qui regardent l’Afrique avec envie, mais ne savent pas par où commencer. En formant des équipes projet diversifiées, nous pouvons créer de belles synergies. C’est le pari que je fais. Nous avons débuté avec Lunana, un projet visant à transformer les fibres de troncs de bananiers en protections hygiéniques 100 % naturelles, biodégradables, écologiques et respectueuses de la santé de la femme.
Mon objectif est d’accompagner les jeunes dans l’entrepreneuriat. Pour moi, la meilleure façon de les soutenir n’est pas de les incuber, comme je le vois souvent, mais de prendre des risques avec eux. Je travaille avec eux et j’ai embauché cinq stagiaires venant de France, ainsi que quatre jeunes de l’École Supérieure Polytechnique du Sénégal. Ensemble, nous avons formé un groupe de dix collaborateurs et avons développé Lunana. Grâce à mon réseau au Sénégal, nous avons structuré le projet, nous l’avons présenté aux acteurs publics et privés, et avons été ravis de l’intérêt suscité, notamment auprès de l’administration, et de plusieurs ministères. La troisième personnalité de l’État, la présidente du Haut Conseil des collectivités territoriales, a été séduite par le projet, ainsi que plusieurs responsables publics.
Nous cherchons désormais des financements, peaufinons le projet d’un point de vue technique et organisationnel. Une fois le prototype prêt, nous lancerons une entité juridique pour Lunana, qui n’existe pas encore. Ces jeunes qui m’accompagnent sortiront de cette expérience avec des actions de la nouvelle entité juridique. Un véritable New Deal de l’entrepreneuriat.
Avez-vous des partenariats avec des universités ?
J’ai des partenariats avec l’École Supérieure Polytechnique, dont sont issus les quatre jeunes qui nous accompagnent, notamment dans les départements de biologie et de mécanique. Je suis également en partenariat avec le Centre de formation professionnelle et technique Sénégal Japon, qui fabrique toutes nos machines d’extracteur de fibre et autres. L’idée est vraiment de tout faire localement, en utilisant les ressources humaines, naturelles et techniques locales, afin d’avoir une solution durable.
J’ai eu une formidable nouvelle cette semaine. En effet, le groupe Lagardère Travel Retail devient notre premier sponsor. Le groupe va contribuer partiellement au financement de la phase de prototypage des serviettes LUNANA qui doit au total coûter 10 millions de francs CFA. C’est formidable. Les entreprises françaises au Sénégal, qui sont ma cible, ont tout intérêt à soutenir de telles initiatives qui créent des liens humains entre les jeunes de France et du Sénégal. Cela contribue à combattre le sentiment anti-français, qui monte dans la région du Sahel, en créant des liens économiques et de qualité entre les générations futures.
Avez-vous des relations avec des universités en France ?
Je suis encore à la recherche de ce type de partenariat. Avec Lunana, nous démontrons ce que nous pouvons accomplir en combinant différentes synergies, compétences et cultures.
J’ai déjà un nouveau projet en préparation. Nous allons lancer une ferme de champignons gourmets, dans le sud du Sénégal, en Casamance. Nous travaillons avec un professeur spécialiste des champignons qui a réalisé de nombreuses recherches et expérimentations sur différentes espèces. Actuellement, il n’existe pas de ferme de champignons au Sénégal, malgré une forte demande pour la consommation immédiate. Ce projet, que j’ai évoqué à la FAO, est très prometteur et pourrait bénéficier de la collaboration d’étudiants passionnés de culture en France ou à Monaco. Il est crucial de les impliquer et de leur permettre d’exprimer leurs talents. Nous cherchons toujours à établir des liens et des partenariats dans une démarche d’innovation. Nous aimons travailler avec le milieu de la recherche et d’autres spécialistes pour optimiser les processus et interpréter nos résultats d’analyses. Nous sommes ouverts à tout type de partenariat.
Lagardère nous soutient financièrement, mais aussi potentiellement pour la commercialisation via leur réseau une fois le produit finalisé. Nous avons autant besoin de partenaires financiers que techniques pour la réussite de ce beau projet pour les femmes.
Qui vous a inspiré dans votre carrière ?
J’ai été inspirée par Aminata Touré, ancienne Garde des Sceaux et Premier Ministre au Sénégal. Pour moi, elle est avant tout une grande sœur, une amie, et j’admire sa simplicité. C’est une femme compétente, brillante, charismatique, qui reste humble malgré ses responsabilités. J’ai eu le privilège de travailler avec elle et de percevoir son exigence envers elle-même. Partout où elle passe, elle est appréciée et applaudie à juste titre. Elle a refusé le poste de secrétaire général adjoint des Nations Unies en 2019 pour poursuivre son engagement au Sénégal, ce qui témoigne de son envergure et de sa détermination à œuvrer pour ce pays. Son humanité et sa sensibilité sont des qualités que j’aspire à reproduire.
Avez-vous un livre ou un podcast qui vous accompagne dans votre vie ?
Une amie à moi, Vince CHAN, anime un podcast sur le changement, un sujet très actuel. Elle interviewe des personnalités du monde entier pour explorer leur rapport au changement. Je vais moi-même, intervenir dans ce podcast pour évoquer la manière dont j’ai pu passer de juriste en banque à Paris à initiatrice de projets économiques à fort impact social au Sénégal. L’Afrique fascine, et c’est un continent qui est au cœur de nombreux bouleversements. Nous n’adoptons pas les mêmes approches de communication, nous réinventons l’industrie dans le but de promouvoir une industrie propre, sans reproduire les erreurs de l’Occident. Il y a tant à apprendre sur ce continent.
Le changement est fondamental et vital dans notre monde actuel, caractérisé par un environnement en perpétuelle évolution. J’ai réinventé ma vie en Afrique, je vous invite à nous rejoindre dans cette belle aventure entrepreneuriale africaine. C’est ça le New Deal !
Auriez-vous une devise ou un mantra ?
« toujours chercher à sortir de sa zone de confort, constamment se challenger », cette démarche est primordiale pour moi.
Ayant travaillé en droit des affaires, en droit des nouvelles technologies, et en droit bancaire et financier, je suis aujourd’hui une généraliste capable d’aborder n’importe quel sujet grâce à ma polyvalence. Cette agilité est cruciale dans le monde actuel. Chacun doit trouver sa propre agilité tout conservant son authenticité. Il est fondamental de rester fidèle à soi-même tout en se construisant et en capitalisant sur ses expériences. C’est cela qui est beau dans la vie !
Voici la page Linkedin de Lunana: https://www.linkedin.com/company/lunanasenegal/
A propos de l’auteur : Pascale Caron est membre du comité de MWF Institute et spécialiste de la technologie dans le domaine de la santé. Elle est CEO de la société Yunova Pharma, implantée depuis 2020 à Monaco et commercialise des compléments alimentaires dans la Neurologie.
Pascale est également directrice de rédaction de Sowl-initiative.