[Coaching] Papa

Entretien avec Maxime Laroche, fondateur de l’Atelier du Papa

Par Patricia Cressot

Nous souhaitons en savoir plus sur votre parcours personnel, parlez-nous de vous?

Je viens du conseil, où j’ai sévis pendant plus de vingt ans. Avec deux spécialités, le L&D et le pilotage des KPI’s et un angle d’approche iconoclaste: les biais cognitifs.

Et puis j’ai rencontré ma femme. Elle a ouvert le champs des possibles, dont la parentalité.

Rien n’aurait pu se faire sans elle. Nous avons, avec notre « grand âge » (Quarantaine passée), connu de sérieuses difficultés pour avoir un enfant.

Nous nous sommes fait aider, via FIV, en Espagne. Et cela à donné des jumeaux. Quatre ans bientôt, ces bêtes là !

Puis nous avons quitté Paris, pour tenter une nouvelle aventure, plus équilibrée.

 

Pourquoi avez-vous décidez, d’aider et accompagner les papas?

Pour moi, la paternité, bien qu’étant quelque chose de plutôt nébuleux, a toujours été un non sujet. Donc dès le début de la grossesse, nous avons participé à toutes les échéances:

Les craintes des premières échos, le développement des petits, la préparation de leur arrivée, les cours avec la sage-femme…

Après, et pour livrer un petit secret, ma vie a basculé lors de l’accouchement. En salle de neonat. Beaucoup de monde qui s’active dans tous les sens, il fait très chaud, c’est la nuit. Je suis à côté de mes pompes, je flotte presque… Et puis, dans sa couveuse, ma fille ouvre ses yeux et les braque sur moi. Je sais bien qu’elle ne me regarde pas. Mais cette émotion, puissante, m’a renversé, balayé. Je suis papa. Ouh p… ! Je suis papa !

Depuis, de l’UME, en passant par le congé pat’, les nuits avec les biberons de 3 heure du mat’ qui piquent bigrement, les changes, la bouffe, l’école, les soins, l’éveil…Nous avançons conjointement. Nous sommes parents. A part égale.

Et donc, au hasard d’une rencontre, je suis tombé sur l’atelier du futur papa. Avec Gilles, Vacquier de la Baume, nous avons discuté longuement. Le fit est passé. Et je me suis senti, légitime dans cette action. J’ai ressenti cette évidence. D’être aligné. Et lorsque j’anime, je suis pile poil là où je veux être. Je suis utile, je fais du bien. Un luxe !

A titre personnel, je m’adresse aux papas, pas aux pères, aux papas. C’est important dans l’articulation pédagogique des ateliers. Je ne suis pas réellement en posture de « sachant ».

Je suis un papa, qui prend les papas pour ce qu’ils sont, pas tels qu’ils aimeraient être, ou qu’ils pensent devoir être. Je lève les postures, vais les chercher, les bouscule parfois, euh, souvent. Et c’est le jeu. Ils vont vivre une expérience. Leur vie d’avant., c’est fini. Par contre la vie continue. OK, mais être autonome, çà implique quoi ? Mon organisation au quotidien va changer, je fais comment ? Qui va faire quoi ? Comment je fais avec mon boulot ?  Et c’est quoi ce foutu lien, comment je le crée ? Comment je le gère ? Et comment je fais avec ma femme ? Notre sexualité ?

Derrière ces préoccupations, il est crucial de leur faire toucher du doigt les notions de plaisir, d’émotions qu’ils vont éprouver en s’occupant de leur gamin. Et çà c’est ma botte secrète !!!

En quoi voyez-vous une différence entre mère et père s’il y en a une? ou comment l’inconscient collectif classe l’un et l’autre et quels sont vos tips pour sortir de ces classements ?

Pour être honnête, je manque de recul et de compétences pour m’aventurer sur ce sujet.

Je crois, par contre, que la société, dans sa composante réelle, nous montre que différents types de parentalités fonctionnent. Monoparentalité, homoparentalité, parentalité étendue (grand-parents, autres membres de la famille, amis proches…)

Après les biais et représentations sociales sont puissants. Prenons le cas du nouveau congé paternité: oui nous passons à 28 jours. Et après ?

C’est un changement de mindset dont nous avons besoin. Tant que celui-ci sera inférieur, et considéré comme « optionnel », les mentalités ne bougeront que très peu.

J’interviens dans des entreprises, où la maternité est encore trop souvent perçue comme un risque. Donc la paternité n’est pas spontanément la bienvenue.

Et puis, on colle encore une image peu valorisante d’un papa qui fait le choix de s’occuper de ses enfants. Ces clichés sont institutionnalisés, par les hommes mais aussi les femmes…

Alors que pour les entreprises, c’est un vrai vecteur de croissance et de durabilité.

Quand elles mettent en place une réelle politique de « parentalité », elles améliorent la qualité d’engagement des collaborateurs, donc l’engagement clients par la symétrie des attentions. De la création de valeur tout simplement.

Les ressorts de satisfactions sont toujours les mêmes, sens/utilité de mon travail, considération pour qui je suis, reconnaissance de mon travail, et, une rémunération correcte.

Certains l’oublie parfois !

Un petit conseil aux papas (et mamans aussi), pour le congé pat, prenez 15 jours ensemble, puis faites 2 « sessions » d’une semaine où le papa est tout seul. La charge mentale, çà se ressent, se comprend, et se pratique, au quotidien.

 

La place du père est-elle différente en Europe du nord peut être moins complexée par rapport à nos pays méditerranéen ? Ou c’est une fausse perception?

En fait, si vous prenez les pays scandinaves, la co-parentalité est effective.

Oui bien sûr, des dispositifs d’aides financières la favorisent. Néanmoins, c’est vraiment un question de mindset. Et cela embrasse les questions de développement, d’éducation, d’écologie, de systèmes politiques.

A contrario, vous prenez le cas de l’Allemagne, où des dispositifs similaires existent.

Et bien il est très mal vu pour une femme, de continuer à faire preuve d’ambition professionnelle, et d’élever ses enfants. Autrement dit, si une femme veut s’épanouir dans sa carrière, mieux vaut avoir un enfant tard. Ou pas du d’enfant tout. 

Dans les pays latins, des différences existes aussi. Mais pas là où nous le pensons.

Prenez l’Espagne, la très catholique Espagne.  Ils sont plus en avance que nous sur des sujets sociétaux: place des femmes, congé paternité, PMA, homoparentalité.

En France, il y a une réelle poussée conservatrice, en lame de fond, et les quelques progrès ne peuvent en aucun cas contre balancer la tendance, je le regrette.

 

Quelles sont les activités que vous suggérez de faire avec les enfants pour le plaisir et pour resserrer le lien père-enfants (évidemment selon l’âge)?

Et bien je vais vous dire, premièrement, pour tisser ce fameux lien, je parle du lien d’amour, d’affection, et bien il faut avant tout commencer par se l’autoriser en tant que papa.

Il faut donc être au plus clair possible avec qui l’on est. C’est un peu de boulot mais je pense que se préparer en se faisant aider pendant la grossesse n’est pas inutile.

Ensuite, j’insiste fortement sur la création du lien dès la grossesse.

Et puis, même si je ne vous l’apprend pas, les meilleurs « outils » sont encore et toujours, le jeu et le temps.

Comment les papas ont géré La COVID, les enfants, le stress travail, environnement anxiogène, manque d’activités/sortie?

Alors je crois qu’ici, il me faut remettre un petit peu les pendules à l’heure.

Nous aimons, collectivement, nous raconter des belles histoires. Mais si j’en crois les études sérieuses, les données du ministère de la justice, de l’intérieur et des services déconcentrés, ce sont les femmes qui ont majoritairement « encaissé » les différents confinements. Elles ont mis leurs carrière en « sommeil » pour s’occuper des enfants et de la maison. Les hommes, les papas en tête, ne se sont, pour une grande part, occupés que d’eux-mêmes, et de leur boulot, si important (oui je simplifie beaucoup, l’équilibre des salaires joue énormément…)

Des données récentes montrent que ceux qui ont bénéficié d’un espace dédié pour le télétravail, sont ces mêmes hommes. Leurs femmes se mettant souvent en quatre pour qu’ils puissent bosser tranquillement, alors qu’elles travaillaient souvent sur la table du salon avec les enfants en bruit de fond…

Si vous me demandez si les mentalités changent, je vous dis non. Si elles bougent un peu, je vous dis, oui. Et notamment chez les moins de 30 ans où l’équilibre vie pro/perso n’est pas un enjeu subalterne.

Mais je vais être direct, même si des spécimens rares d’hommes ont percuté et se sont appropriés au quotidien cette fameuse notion de charge mentale, force est de constater que, dans l’action, pas dans l’idée, si le souhait des hommes de participer plus activement n’est pas encouragé et soutenu par leur conjointe, ils restent dans le schéma classique. Madame pilote, et eux sont là en roue de secours.

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