Du conseil stratégique à l'entrepreneuriat

Interview de Marion Boyadjis, fondatrice et gérante du restaurant Casa Leya et du club sport et bien-être Flexx.

By Pascale Caron

La carrière de Marion est marquée par une transition réussie du conseil en stratégie et de la finance à l’entrepreneuriat dans le secteur du bien-être et de la restauration. Depuis plus de six ans, elle dirige Casa Leya, un établissement à Nice, illustrant sa capacité à identifier et à répondre aux besoins du marché local en matière de restauration. Son nouveau projet, Flexx Nice, sera un club sport et bien-être haut de gamme qui inclura un écosystème bien être avec piscine, Sauna, hammam, un espace de co-working et un restaurant healthy.

J’ai fait sa connaissance lors d’un comité de financement d’Initiative Côte d’Azur et j’ai tout de suite été séduite par ce beau projet et par sa personnalité. J’ai tout naturellement voulu en savoir plus…

 

Qu’est-ce qui t’a amenée à devenir entrepreneure ?

J’ai fait l’École Centrale Paris après une prépa. Étant à l’époque très intéressée par les matières scientifiques, j’ai découvert à Centrale qu’au final, j’étais plus attirée par les sujets de type business, économie, etc. En sortant de Centrale, les voies qui s’ouvraient, c’était soit la banque, soit le conseil.

J’ai donc commencé par la banque dans les fusions-acquisitions. J’ai travaillé chez Goldman Sachs à Londres, qui était à l’époque ce qui se faisait de mieux dans le domaine. J’ai ensuite rejoint BNP Parisbas à mon retour en France, et assez vite, je me suis rendu compte que je n’étais pas faite pour ça. Je me suis alors dirigée vers le conseil en stratégie. Je suis entrée au Boston Consulting Group, qui est la référence dans le domaine.

J’y suis restée pendant un peu plus de six ans et j’ai gravi les différents échelons jusqu’à être Principal, le grade avant Partner. Je me suis spécialisée en « Consumers Goods » : les biens de grande consommation. J’étais chef de projet senior sur la fin, et je gérais plusieurs clients en parallèle. Si mon travail était passionnant, d’un point de vue personnel, j’avais envie de changement. Avec mon mari, qui est devenu mon ex-mari et mon associé nous étions à la recherche d’une meilleure qualité de vie dans le sud, loin de Paris. On a donc étudié différentes villes de la Côte d’Azur et on est tombé sous le charme de Nice, mais sans connaître spécialement. Nous sommes restés en très bons termes et on continue à faire tous nos projets professionnels ensemble, et ça se passe très bien.

En concrétisant ce projet de vivre sur Nice, on s’est rendu compte que les jobs qu’on exerçait n’existaient pas en province, ils sont vraiment très parisiens. On s’est dit que le plus intéressant serait de monter nos propres boîtes. En partant de ce constat, j’ai fait des recherches. J’apprécie beaucoup le contact direct avec le client. Je suis attirée par le domaine de la nourriture, du sport et du bien-être. Tout cela me parle tant à titre personnel, que professionnel. J’aime les endroits où l’on vient passer un bon moment, où on est heureux d’être là. En partant de ce constat, on a fait une étude de marché pour voir sur quel positionnement monter un restaurant. Nous avons ouvert Casa Leya 1 an après être arrivés sur Nice en 2017. C’est une affaire qui tourne bien : nous avons entre 30 collaborateurs l’hiver et 60 l’été entre la salle et la cuisine. J’ai un petit peu musclé les fonctions supports qu’historiquement je faisais moi-même, comme la communication sur les réseaux sociaux, la réservation de groupes, la partie comptabilité, le contrôle de gestion et la RH. Cela me permet de libérer du temps pour d’autres taches. Je suis la gérante et j’ai 70 % des parts. Mon associé m’a surtout aidé lors de la construction du projet. On se parle régulièrement toutes les semaines. Mais c’est moi qui gère au quotidien. Il a pas mal d’entreprises à gérer de son côté.

 

Et tu te lances dans une nouvelle aventure qui est le Flexx à Nice. Mais tu vas pouvoir gérer les 2 de front ?

Oui, tout à fait. D’ailleurs, c’est rigolo parce qu’on m’a remonté qu’il y aurait des rumeurs de vente de Casa Leya, alors que pas du tout. On a bien développé le restaurant et on a acheté le fonds de commerce voisin pendant le COVID. On a eu l’autorisation d’avoir la terrasse sous les arcades du cours J.Chirac et ça, c’est super.

C’est un lieu qui est très apprécié des Niçois, au soleil en hiver, et à l’ombre l’été avec un petit air frais. Maintenant, avec l’équipe qui s’est renforcée, j’ai du temps pour me consacrer au moins partiellement à une autre activité. On avait envie de faire quelque chose dans le domaine du fitness. On s’est rendu compte qu’il y avait un manque sur le créneau haut de gamme à Nice en centre-ville et une vraie demande venant d’une clientèle CSP+. Il existe beaucoup de salles low cost, mais ce type d’offre est quasiment absent. On s’est inspirés de ce qui fonctionne bien à Paris ou à Londres. On a voulu créer un lieu de vie où il y a non seulement le côté sportif, mais également la partie bien-être spa et le coworking et aussi le restaurant. Et du coup, pour faire tout ça au même endroit, il nous fallait une belle superficie !

On souhaitait être en plein centre-ville pour toucher cette clientèle qui habite ou travaille dans le secteur. Il n’y avait pas tant de locaux disponibles que ça, à part celui du George qui avait été fermé en 2015, un emplacement absolument magnifique avec une grande hauteur sous plafond. Il est chargé d’histoire. Ça a été la première cuisine ouverte et précédemment un théâtre, un casino. Beaucoup de niçois connaissent cet endroit. On s’est projeté vraiment dans ce local, même si en termes de travaux, il y avait beaucoup de choses à faire. On l’a repris en avril dernier et on a débuté le gros œuvre dans la foulée. L’idée, c’est de proposer une expérience personnalisée à chacun. Le lieu sera un endroit exceptionnel afin de prendre soin de son corps et de son esprit : à la fois sur le côté physique et bien-être. Au niveau sportif, on aura de très beaux équipements en libre-service, en cardio et en musculation. On aura une centaine d’heures de cours collectifs par semaine et du coaching privé, avec des instructeurs, tous diplômés d’État, et que l’on a recrutés avec attention. Nabil Benhaij sera notre directeur d’exploitation. Côté bien-être, on aura une piscine dans laquelle seront organisés des cours aquatiques, un sauna, un hammam, un espace détente, des cabines de consultation, ostéopathe, diététicien et ensuite un espace soins de la marque Algotherm.

Il y aura une zone coworking : tout d’abord des places au niveau du restaurant où chaque membre pourra travailler à son rythme quand il le désire. Et on aura aussi un coworking fermé sur abonnement spécifique où des personnes qui souhaiteraient installer leur entreprise peuvent avoir un bureau qui leur est consacré à l’année. Pour la partie restauration, nous avons créé une autre marque, Foodie avec une salle qui donnera sur l’extérieur, ouverte à tous. Il y aura également une salle dans le Flexx dédiée uniquement aux membres. La cuisine sera ouverte toute la journée de 8 h à 18 h sur un concept brunch et coffee shop avec des options healthy pour la clientèle sportive. En termes de boissons, on aura une carte assez développée : beaucoup de smoothies, de milkshakes et des shakers protéinés.

 

C’est très impressionnant. Comment vont se passer les liens avec Casa Leya ?

 Une partie de l’équipe de Casa Leya va être transférée : le directeur va chapeauter les 2 établissements. Certains collaborateurs de Casa Leya travailleront à Foodie, ce qui créera des synergies. C’est une restauration qui est fermée le soir, avec un service en continu en journée. C’est le Graal pour les collaborateurs. Le reproche le plus fréquent dans la restauration, c’est qu’on travaille le soir, en coupure. Quand on a mis des annonces sur internet, on a eu pas mal de retours, parce que ces jobs sont rares et convoités. On attire du personnel qui potentiellement a des enfants et qui pourra les chercher à la sortie de l’école.

 

Mais toi, comment gères-tu ?

Je travaille en journée, car je ne suis pas impliquée de manière opérationnelle dans le restaurant. L’expérience acquise avec Casa Leya m’a permis de mettre en place une équipe solide, capable de piloter le quotidien efficacement, me libérant donc pour me consacrer également au Flexx. Le partage de certaines ressources entre les deux établissements crée une synergie bénéfique pour tous. Chez Flexx, il y aura une dizaine de coachs, le même nombre de commerciaux. Ensuite, on aura les équipes du spa et les équipes de blanchisserie et ménage, qui seront externalisées. Au restaurant, nous aurons également une dizaine de collaborateurs.

 

Quels sont les secrets de ce succès ?

Respect des réglementations, management humain et attentionné, et un engagement profond envers le bien-être de notre équipe. Nous organisons régulièrement des activités de team building, renforçant ainsi le lien et la fidélité de nos collaborateurs. Tous nos responsables sont les mêmes depuis l’ouverture, ce qui est assez rare dans la restauration : on en est très fiers.

 

Quelles sont les personnes qui t’ont inspirée dans ta carrière ?

Je ne viens pas d’une famille d’entrepreneurs. Au BCG, j’avais surtout des contacts avec de grosses boîtes du CAC 40, pas vraiment le monde de l’entrepreneuriat. Mais à Nice, j’ai rejoint le CJD, un club où on est tous chefs d’entreprise. Là, ça a été super intéressant parce qu’on peut échanger sur tout : les galères, les succès, comment on avance. Ça aide beaucoup. En plus de ça, il y a le « Réseau Entreprendre » qui me suit et Initiative Côte d’Azur qui m’ont soutenue pour le financement.

 

Est-ce que tu aurais un livre à nous conseiller ?

À une époque, je lisais beaucoup sur l’entrepreneuriat pour m’inspirer. Un livre en particulier m’a vraiment marquée : « One to Zero » de Peter Thiel. Il nous explique comment lancer et gérer des startups d’une façon qui sort de l’ordinaire, en mettant l’accent sur l’innovation. Ce livre m’a ouvert les yeux sur l’importance de créer quelque chose de nouveau, de passer de rien à quelque chose. Ça m’a beaucoup aidée à penser différemment à propos de mes propres projets. C’était le genre d’inspiration dont j’avais besoin à ce moment-là.

 

Est-ce que tu aurais une devise ou un mantra ?

L’entrepreneuriat est un parcours semé d’embûches, mais chaque obstacle surmonté intensifie notre capacité à affronter les suivants. « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts » est une devise qui résonne profondément avec mon expérience.

 

Retrouvez le club Fexx sur le site https://www.flexx-club.fr/

 

A propos de l’auteur : Pascale Caron est membre du comité de MWF Institute et spécialiste de la technologie dans le domaine de la santé. Elle est CEO de la société Yunova Pharma, implantée depuis 2020 à Monaco et commercialise des compléments alimentaires dans la Neurologie.

Pascale est également directrice de rédaction de Sowl-initiative.


[Management] Soft-skills

Interview de Christine Coutant, co-fondatrice d’Ask'n Get by ARANSI.
By Pascale Caron

Tout au long de son parcours professionnel, son fil conducteur s’est exprimé à travers l’accompagnement humain. Chimiste, elle a travaillé plusieurs années pour la sécurité des consommateurs dans des entreprises pharmaceutiques et cosmétiques. Trouver le sens de son existence est une quête difficile, mais fascinante. Elle l’a découvert en 2014 après une formation en Coaching. L’humaniste a pris le pas sur la chimiste et elle a intégré l’équipe ARANSI en tant que coach (certifiée PCC [ICF] et PCM®) et formatrice en management d’équipe.
Son expérience personnelle ajoutée au fait de travailler pour renforcer le leadership de ses clients l’a conduite à s’engager également dans l’accompagnement de dirigeants et des entrepreneurs.

Ses multiples expériences lui ont permis de participer à la co-fondation d’Ask'n Get, en 2019. C’est une plateforme digitale écoresponsable pour aider les chefs d’équipe et de projet dans leur processus de décision grâce à des séances de conseils pratiques au moment où ils en ont besoin.

Comment es-tu passée de chimiste des entreprises pharmaceutiques et cosmétiques à la carrière de coach ?

J’ai démarré par un master en alternance en Formulation Analyse et Qualité à l’Université de Nice. J’ai réalisé une année d’alternance dans le secteur des Affaires Réglementaires au sein du laboratoire Virbac et je suis montée ensuite sur Paris. J’ai passé 5 ans aux Laboratoires Gilbert en Normandie, sur les parties cosmétiques, biocides, compléments alimentaires et alimentation pour bébé.
J’ai eu la chance lors de mes grossesses successives de prendre du recul et de réaliser que le côté humain comptait plus pour moi que le scientifique. J’ai tout d’abord mené un projet entrepreneurial et une étude détaillée pour monter mon propre cabinet d’Affaires Réglementaires. Mais le timing, en pleine crise de 2008, m’a découragée.
Mon mari m’a alors proposé de rentrer chez ARANSI, une société qu’il avait créée, en m’occupant de la partie Formation. J’ai pris conscience rapidement qu’il manquait une corde à mon arc que j’ai acquise avec une formation de Coaching. Chez ARANSI, j’anime encore des formations destinées aux Managers, car j’estime que c’est un métier qui s’apprend même si au départ on n’est pas forcément fait pour ça. Le coaching est une magnifique posture qui me permet d’amener les choses d’une façon totalement différente. J’entretiens également cette posture comme coach professionnelle et je me suis rendue compte que j’attire essentiellement des femmes.

Je t’ai rencontrée lors du programme Start des « Premières Sud », tu animais la session. Comment vois-tu l’entrepreneuriat au féminin ?

L’idée derrière ces programmes c’est de faire de la femme un acteur économique au même titre que l’homme en est un. Nous devons éviter les clivages. Un des récents secrétaires généraux de l’OCDE, Angel Gurría, disait que les femmes étaient l’actif le plus sous-utilisé dans l’économie mondiale. Une étude de l’OCDE montre que si on était à égalité homme-femme en participation au marché de l’emploi et en taux d’entrepreneuriat en France on gagnerait 9,4 % de croissance sur 20 ans. Je parle plus de mixité entrepreneuriale, c’est ça la vraie richesse. J’interviens au sein de l’école des Mines sur le thème « Entrepreneuse demain ». Elles sont peu nombreuses dans un domaine à forte valeur ajoutée, mais peu se voient chef d’entreprise.

Tu crées Ask'n Get en 2019. Peux-tu nous expliquer le concept ?

Ask'n Get accompagne le développement des compétences managériales par l’expérience. C’est une plateforme de mise en relation de managers et d’experts internationaux en management. Nous fournissons de l’E-conseil en management d’équipe et de projet contextualisé et à la demande.
La partie Tech et l’idéation viennent de mon mari, Romain. J’apporte le complément humain, d’où mon rôle de Chief eXperience Officer qui recrute les personnes et les experts derrière la machine. Je suis responsable du développement des compétences des managers en me fondant sur l’expérience d’autres managers. Chacun de nos clients se pose des questions au quotidien, on leur propose un espace d’échange. Nous avons des rendez-vous sur des formats courts et à distance. On s’adresse à la personne et c’est l’entreprise qui adhère à ce programme. Chacun de nos experts a beaucoup de recul sur la posture managériale. Je les ai recrutés avec soin et nous partageons les mêmes valeurs. Nous avons créé un écosystème sain et gagnant pour tous. Nous étions basés en Irlande pendant 3 ans et après la période COVID, nous sommes rentrés à Paris. Notre ambition est internationale, nous voulons devenir l’acteur incontournable du monde managérial. Nous nous adressons à une tranche d’âge entre 30 et 50 ans. Notre proximité avec l’entreprise nous permet également de conseiller les RH sur les besoins en accompagnement des managers (formation, coaching, conseil). Nous organisons également des rendez-vous post-formation, afin d’entretenir les acquis et voir ce qui a été mis en œuvre. Notre communauté a vocation à s’étendre, mais pour l’instant nous gardons un noyau dur qui a toute notre confiance.

Quelles sont les personnes qui t’inspirent ?

Je ne vois personne en particulier, mais plus des personnalités. Les femmes entrepreneures qui font face à un véritable défi de société et d’éducation m’inspirent. Ce que j’admire chez elles, ce sont l’empathie et l’ouverture d’esprit. J’apprécie celles qui savent rester dans l’humilité sans domination.

Aurais-tu un livre à nous conseiller ?

J’en proposerais 3. Tout d’abord « Les 7 habitudes de ceux qui réussissent tout ce qu’ils entreprennent » de Stephen Covey. C’est un ouvrage très structurant sur une démarche entrepreneuriale saine et réfléchie.
J’ai également, « L’autoroute du millionnaire » de M.J. DeMarco. Il remet en question le rapport à l’argent de manière radicale.
Et enfin un collectif de femmes, Les Sororistas, a rassemblé un recueil de récits dans « Les femmes écrivent le monde de demain ». J’y ai participé parmi 600 autres femmes à travers tout le monde francophone.

Pour terminer quelle est ta devise ou ton mantra ?

Mon mantra : « La joie est en tout, il faut savoir l’extraire », de Confucius. Il me permet de surmonter les écueils du quotidien et l’extraction me rappelle aussi mon premier métier.
Ma devise, « Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends. », de Nelson Mandela parce qu’elle enlève la notion d’échec de l’équation.

A méditer.