Le 6 octobre dernier se déroulait la 2eme conférence MWF Institute de la saison à Monaco dans les locaux de Monacotech. A cette occasion, Pascale Caron, CEO de Yunova Pharma, avait modéré la session. Retrouvez cette interview sur sowl-initiative.
Monacotech est un lieu d’échanges, de rencontres, d’apprentissage et d’innovation, imprégné par l’ADN de Monaco. Le but est d’aider les startups à s’implanter sur le territoire et à se développer avec succès, ici et à l’international.
Le portfolio actuel opère dans un large éventail de secteurs : de l’IA à la Medtech, de la GreenTech à la Fintech en passant par le Yachting. Soucieuses de l’impact social et environnemental de leur activité, les jeunes pousses de MonacoTech utilisent l’innovation et les technologies pour répondre à des problématiques de société, de santé et d’environnement. Elles représentent une opportunité pour des investissements à impact social. 15 startups bénéficient aujourd’hui du programme Monacotech parmi lesquelles Vizua, Trimed, Coraliotech, Carlo, Laneva, Novetech surgery, Innodeep, Spheno Id….
Nous avons la chance d’être ici dans leurs locaux, accueillis par le maitre des lieux, Lionel Galfré.
Lionel, quelles sont vos missions au sein de MonacoTech ?
Notre objectif est de faire en sorte que les projets innovants puissent être accompagnés à Monaco, et qu’ils deviennent viables économiquement. Les innovations portées doivent pouvoir être diffusées au plus grand nombre et bénéficier à l’économie monégasque, notamment via la création d’emplois.
On considère qu’une innovation si elle n’est pas partagée et valorisée ne sert à rien. Notre rôle est de sélectionner parmi l’ensemble des candidatures, celles ayant du sens et un fort potentiel, tout en restant fidèles aux valeurs de la Principauté.
Une fois ces projets identifiés, notre objectif est alors de proposer aux startups un programme d’accompagnement sur-mesure, en mettant à leur disposition des outils. Nous devons faire en sorte qu’une idée remarquable soit aussi un produit lisible afin qu’il puisse trouver son public. Le but est de les voir s’épanouir, se lancer et pérenniser leur société. Monacotech les suit à chaque étape clé de leur développement, en leur faisant bénéficier d’un accès aux meilleurs ressources, experts et acteurs de l’écosystème local, international et économique. Nous les mettons en relation avec des fondateurs, des prestataires de services, des investisseurs ainsi qu’avec une communauté d’entrepreneurs. La période d’incubation varie en fonction des besoins de la startup. Elles bénéficient d’un accompagnement administratif et il n’y a aucune prise de participation dans les startups.
Pouvez-vous dresser un bilan des réalisations de Monaco Tech ?
L’incubateur est né fin 2017, on commence donc à avoir une visibilité sur ce qui peut marcher ici. Nous ciblons les candidatures qui sont en accord avec les valeurs de Monaco comme celles évoluant dans la CleanTech, Biotech, MedTech, Yachting et numérique. Notre volonté est de faire en sorte que ces structures grandissent et se perfectionnent au sein de notre incubateur et qu’ensuite elles perdurent sur le sol monégasque. En 3 ans d’existence, MonacoTech a hébergé une quarantaine de startups qui ont généré une centaine d’emplois, dont une portion à l’étranger, et qui ont réalisé plusieurs levées de fonds.
Est-ce que les startups échangent entre elles au sein de Monacotech ?
Oui, et cela fait partie de nos missions. Pour cela, nous organisons des évènements permettant de créer des liens et une véritable communauté. Nous souhaitons que les gens débattent et que cela puisse donner naissance à de nouvelles collaborations, ce qui est d’ailleurs le cas, notamment entre des projets médicaux et digitaux.
Nous avons donc aujourd’hui 3 startups spécialisées dans la MedTech : Maud Bouresche cofondatrice de Novetech Surgery, Omar Bouhelal Schirmer fondateur de Spheno Id, et Mustapha Hamdi, CEO d’Innodeep.
Novetech Surgery est représentée par sa co-fondatrice Maud Bouresche. Maud est juriste de formation. Elle est très investie à Monaco en tant que vice-présidente de la jeune Chambre économique. « Novetech Surgery » fournit aux vétérinaires une gamme innovante d’implants chirurgicaux orthopédiques pour la réparation ligamentaire et tendineuse, ainsi que des implants de chirurgie osseuse et viscérale, s’inspirant de la chirurgie humaine.
Leurs produits sont associés à des techniques chirurgicales développées en partenariat avec des chirurgiens vétérinaires. Leur technologie de pointe est pensée pour être mini-invasive et offre l’avantage considérable d’un processus post-opératoire simple, ainsi qu’une récupération rapide de l’activité normale de l’animal.
Maud, pouvez-vous nous expliquer la genèse de votre société ?
Avec mon associé Victor Robelo, nous avions une connaissance de l’orthopédie humaine. Une de nos amies chirurgien avait fait opérer son chien et nous avait fait part du fossé qu’il existait entre les techniques orthopédiques humaines et vétérinaires. Venant d’une famille d’entrepreneurs dans la chirurgie orthopédique humaine, on a décidé d’adapter ces techniques aux chiens et chats.
Notre projet a démarré en 2016 et en 2017 après une phase de R&D, nous avons commencé par réaliser un catalogue avec des vétérinaires KOLs en partenariat. Nous avons réalisé des tests biomécaniques et des études cliniques. Nous avons innové notamment sur la taille des implants. Nous formons les chirurgiens aux techniques opératoires et publions ces méthodes. De 2020 à 2021, nous avons fait une grosse croissance ce qui nous a permis de structurer la société et de passer à 6 personnes. Nous avons 200 chirurgiens poseurs et 2000 chiens ont été opérés dans le monde entier, en particulier au Canada et en Australie.
Nous sommes alumni de Monacotech que nous avons intégré en 2017 et sommes hostés à Monaco Boost.
Quels sont vos futurs projets ?
Nous avons entamé une levée de fonds pour accélérer notre pénétration sur le marché et réaliser plus de R&D et d’études cliniques dans la réparation du ligament croisé antérieur. Nous avons une notoriété en France et en Europe et le marché commence à être mature. Notre ambition est à présent de développer le marché américain, et nous participons pour cela à notre premier congrés aux USAs.
Présentons maintenant Spheno Id : Omar Bouhelal Schirmer est expert en modélisation 3D dont il est spécialiste de premier plan, dans les domaines médicaux et pédagogiques. Il un véritable pionnier des techniques et applications d’impression 3 D.
Après une licence d’arts plastiques à l’Université Paris Sorbonne, un master en technologies multimédias, il se spécialise depuis 2003 dans les matières anatomiques. Il réalise des modèles 3D et des vidéos pour des cours et des conférences avec le Pr Jean François Gaudi à l’Université Paris V René Descartes. Il collabore avec les Drs Bernard Cannas et Luc Gillot supervisant le programme de formation Sapo Implant, et d’autres spécialistes de la communauté médicale. Sa rencontre avec Sylvain Ordureau en 2008, lui a permis de participer à l’aventure VIZUA, pendant 3 ans en tant que conseiller technique auprès de l’équipe de développement.
Il est depuis 4 ans Directeur général de Spheno id à Hong Kong. Il propose des solutions pour l’enseignement de la chirurgie et de l’anatomie, de nouvelles façons de former les médecins, des chirurgiens-dentistes et les étudiants sur mesure en utilisant l’impression 3D, vidéo, AR/VR. Il a rejoint la Monacotech en septembre.
Omar, pouvez-vous nous expliquer la genèse de votre société ?
Depuis le début de ce siècle, la chirurgie buccale et maxillo-faciale est en constante évolution. Apprendre la procédure chirurgicale en disséquant des cadavres est une excellente méthode d’enseignement pour les étudiants et les chirurgiens expérimentés. Mais les cadavres humains utilisés à des fins scientifiques sont rares et il est presque impossible d’avoir un sujet identique. L’impression et la modélisation 3D permettent à Spheno Id de créer des modèles 3D et du contenu vidéo (AR/VR), basés sur des fichiers DICOM de patients réels. Ils auront la même morphologie et qualité osseuse que les mâchoires du patient. Les modèles 3D peuvent être dupliqués à l’infini, à un coût modéré. Les outils virtuels ou physiques développés et fabriqués par Spheno id sont commercialisés auprès de médecins, d’universités ou d’industriels. Il est possible par exemple de faire du « Live training surgery », les étudiants assistent à l’opération réelle le matin et pourront pratiquer sur ce cas en 3 D.
Quels sont vos projets ?
Tout d’abord s’exporter à l’international comme Allemagne, l’Italie et aussi le Moyen-Orient. Nous voudrions également aller plus loin dans la mise en situation en utilisant un mix d’AR et VR et de 3D afin d’expérimenter l’haptonomie, c’est-à-dire la sensation par le toucher.
Passons maintenant à Mustapha Hamdi, qui est le CEO d’Innodeep.
Consultant expert en IA pour l’UNESCO, il a obtenu son doctorat à l’INSA France et est certifié en Deep Learning. Ses activités de recherche et de co-innovation se concentrent sur l’IA, la Medtech et l’IOT. Préoccupé par la pénurie de radiologues dans le diagnostic du cancer du sein, il apporte une solution innovante grâce à la téléradiologie et l’IA. Enseignant-chercheur, il a fondé la startup Innodeep, qui propose une plateforme d’interprétation à distance appuyée par l’intelligence artificielle. Cette solution permet d’accélérer la prise en charge des patients et renforce l’offre de soins dans les régions où les radiologues manquent.
Il a reçu cette semaine le prix du numérique du Monaco Business.
Mustapha, pouvez-vous nous expliquer le Projet Innodeep ?
Innodeep est une application SAAS de détection et de suivi des cancers par intelligence hybride (IA). L’algorithme développé par Innodeep permet la détection de cancers par le deep learning.
Cette technologie offre la possibilité aux médecins de diagnostiquer rapidement et avec une haute précision des cancers. Les femmes résidentes dans les pays d’Afrique notamment, sont, pour la plupart privées de diagnostics dans la détection du cancer du sein. Innodeep apporte une solution à distance dans le but d’améliorer les services de santé, tout en réduisant les coûts et le temps du diagnostic. Le maitre mot du projet est la démocratisation de l’accès à la santé.
Si nous avions au départ démarré sur IBM, nous avons actuellement migré sur Amazon AWS qui nous offre un partenariat. Notre plateforme génère un rapport numérique qui est validé par la suite par un médecin expert qui fait partie de notre réseau.
Où en êtes-vous dans votre développement ?
Pendant la pandémie nous avons travaillé sur la COVID. Nous avons commencé les cas concrets en Tunisie, où la solution a été adoptée par le ministère de la Santé.
Mon associé est radiologue, basé à Paris. Nous signons des partenariats avec les centres de radiologie existants. Nous avons également le projet de mettre en place 2 établissements pilotes en Afrique. Nous investiguons actuellement le Togo. Nous devrions avoir l’accord pour le bâtiment d’ici la fin de l’année. Nous recherchons pour cela des investisseurs ou des mécènes.
J’ai maintenant quelques questions pour vous trois :
Maud, avec le recul, que vous a apporté l’accompagnement Monacotech ?
Quand on a démarré, nous travaillions en autarcie, on se sentait très seuls. L’intégration à Monacotech a été socialement très positive. Nous avons pu échanger avec des entrepreneurs qui avaient les mêmes problématiques que nous. On a été épaulés par la communauté. Nous avons également bénéficié du FABLAB ou nous avons pu installer notre machine de traction pour les études biomécaniques.
Omar, que vous procure l’accompagnement Monacotech ?
Ma priorité aujourd’hui est de pouvoir déléguer ce que j’ai pu expérimenter seul. Monacotech m’apporte l’écosystème idéal pour passer à l’échelle business supérieure, ainsi qu’un réseau pour me développer à l’international.
Mustapha, j’ai la même question pour vous :
En premier lieu Monacotech m’apporte le networking et l’accès aux investisseurs. Mais une des richesses de faire partie d’un incubateur, c’est la co-création. Nous travaillons actuellement sur un projet avec Coraliotech,…
A propos de l’auteur : Pascale Caron, membre du comité MWF Institute et spécialiste de la technologie dans le domaine de la santé, a modéré cette session. Elle est CEO de la société Yunova Pharma, implantée depuis 2020 à Monaco et commercialise des compléments alimentaires dans la Neurologie. Pascale est également directrice de rédaction de Sowl-initiative.
A propos de MWF Institute : ce think tank a pour vocation d’organiser des conférences autour des thèmes de l’économie responsable, la finance, les enjeux sociétaux divers, le droit, et le management. Ceci dans un esprit INCLUSIF, accueillant parmi nos membres les étudiants, salariés, chefs d’entreprises, retraités, en favorisant les femmes mais sans distinction de genre. Il nous parait aujourd’hui indispensable d’avoir un impact positif sur les nouveaux enjeux de l’environnement social et économique; ce pourquoi nous avons créé ce think tank.
Présidente Patricia Cressot, Vice présidente Joanna Damar-Flores, ainsi que Aude Lefevre Krumenacker, Nelly Montanera, Julie Clémentine Faure et Päscale Caron.